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SCHULHOFF ERVÍN (1894-1942)

Né austro-hongrois le 8 juin 1894 dans une famille juive allemande de Prague, Ervín Schulhoff se révèle un enfant prodige, salué comme tel en 1901 par Dvořák qui le fait inscrire directement au cours de piano de Heinrich Kaan à Prague. Il part pour Vienne afin de suivre la classe de Vilmos Thern, complète sa formation musicale à Leipzig (1908-1910), auprès de Max Reger et de Robert Teichmüller, puis à Cologne, ou il prend quelques leçons avec Debussy, qui va laisser une empreinte indélébile sur son œuvre, l'opéra Die Flammen compris. Mobilisé sous l'uniforme autrichien durant la Grande Guerre, il revient du front convaincu de la nécessité d'une réconciliation profonde entre les cultures germanique et tchèque. Il constate que les « arts nouveaux » s'élaborent essentiellement au sein de l'Allemagne de Weimar. Ses premières partitions sont de climat mahlérien, telles la symphonie Paysages, pour mezzo et orchestre, op. 26 (1918), ou la Symphonie humaniste, avec contralto, op. 28 (1919), sur des vers de Theodor Daübler. Il se lie avec ce poète, les peintres George Grosz et Paul Klee, les dadaïstes de Munich et de Dresde. Dans cette dernière ville, il fonde une société de concerts, Werkstatt der Zeit, et fait connaître les partitions de Berg, Hauer (le premier dodécaphoniste viennois), Erdmann, Scriabine, Schönberg, Webern, Hindemith, Bartók... Son cycle pianistique Zehn Themen est destiné à accompagner l'exposition de lithographies cubistes-futuristes d'Otto Griebel. Ce recueil inaugure une recherche instrumentale de « petites formes » inspirée, en particulier, des expériences d'Alois Hába sur les micro-intervalles. Il joue les suites et les fantaisies de Hába pour piano à deux claviers en quarts de ton. À la même époque, il a la révélation du ragtime puis du jazz, et tient souvent le piano dans les boîtes de nuit entretenant un jazz-band. Dans une lettre à Alban Berg datée du 2 février 1921, le pianiste-compositeur ne cache pas son enthousiasme : « C'est incroyable comme j'aime les danses à la mode, et il m'arrive de danser des nuits et des nuits avec des entraîneuses pour le seul plaisir du rythme et de l'ivresse sensuelle qui s'empare de mon subconscient. J'acquiers ainsi pour mon travail une source phénoménale d'inspiration, car ma conscience immédiate est on ne peut plus terre à terre voire animale. » Ainsi naissent plusieurs cycles pianistiques : Partita (1922), en huit parties, faisant le recensement de ces fameuses danses et des différents types de rag-music ; Cinq Études de jazz (1926) ; Esquisses (1927) ; Hot Music (1928) et Suite dansante en jazz (1931), en six parties. Il se joint parfois à l'orchestre du Théâtre libéré de Jiří Voskovec et Jan Werich, où il côtoie le compositeur Jaroslav Ježek. Son oratorio de jazz H.M.S. Royal Oak (création radiophonique à Brno le 12 février 1935), sur un texte d'Otto Rombach, marque la fin de son activité de compositeur d'avant-garde de sa période néo-américaine. Son œuvre pour la scène la plus élaborée demeure Plameny (Die Flammen, 1927-1929), sur un livret freudien de K. J. Beneš, tragi-comédie donnée dans une version abrégée à Brno en 1932 (par le chef d’orchestre Zdeněk Chalabala). La partition complète, en deux actes, nouvel avatar sulfureux du mythe de Don Juan dévoré par les flammes de la volupté, du sexe, de la vie et de la mort, se présente comme un hommage transcendé à Mozart, Wagner, Richard Strauss, Debussy... construit tel un film fantastique et expressionniste.

La résurrection du reste de son œuvre s'est faite lentement. D'abord à Prague en 1946 lorsque est donnée la dernière de ses symphonies achevées, la Sixième, dite « de la liberté » (1940-1941), dont le final avec chœur reprend le texte du poème de Chamisso : Esclaves. Dans son pays[...]

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