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ESPACE, architecture et esthétique

En Occident, l'espace de l'œuvre d'art a longtemps tendu à se confondre avec sa représentation, telle qu'elle a pu être pensée à travers la perspective. Ce que celle-ci inventait, en effet, c'était un sujet théorique capable de maîtriser l'espace et, en l'inscrivant dans un cadre, donc en le calculant, de le proposer au spectateur comme pure visibilité.

La révolution du regard induite par l'art moderne a pour une part consisté à rendre l'œuvre à elle-même, à faire en sorte que celle-ci puisse à nouveau susciter son espace propre, au lieu de se donner comme une simple forme dont la perception dépendrait d'une grille préexistante. La peinture, la sculpture, l'architecture aussi, y ont acquis une vérité renouvelée : car ce n'est pas seulement l'espace concret qui se trouve alors reconquis, mais aussi sa dimension psychique, seule à même de permettre un dialogue fructueux entre l'œuvre, l'artiste et celui qui la contemple

Architecture

Le substantif « espace » appartient aujourd'hui au langage courant concernant l'urbanisme (espace urbain, espace public, espace vert) et l'architecture (espace classique ou baroque, statique ou dynamique... et, plus spécifiquement, espace de séjour, espace de repos). Mais cet usage est récent. Il ne s'est généralisé qu'après les années 1940, lorsque la locution « arts de l'espace » a remplacé, sans s'y substituer, la locution « arts du dessin » consacrée par Vasari.

En architecture, c'est le « mouvement moderne » qui, depuis les années 1920, a introduit l'usage systématique du concept d'espace. Toutefois, celui-ci avait déjà été élaboré dans une perspective architecturale par des historiens d'art de langue allemande que marquaient la philosophie critique de Kant et l'Esthétique de Hegel, et qui avaient assimilé les premiers travaux de la psychologie de la forme (Christian von Ehrenfels, 1890). Par la suite et jusqu'à maintenant, la réflexion architecturale sur l'espace a continué de puiser aux sources de l'histoire de l'art et de la psychologie, tout en faisant appel aux recherches de l'épistémologie et de la phénoménologie.

Il en est résulté un corpus de travaux, vaste et touffu, qu'on ne peut prétendre aborder exhaustivement. On privilégiera ici deux perspectives. D'une part, d'un point de vue historiographique, en s'appuyant sur un échantillon d'ouvrages fondamentaux, on montrera trois aspects de la valeur opératoire et heuristique du concept d'espace, conçu comme champ de l'expérience humaine, déterminé par l'architecture. Sa dimension esthétique a permis d'étayer les analyses et les périodisations des historiens d'art, de Aloïs Riegl et August von Schmarsow à Sigfried Giedion, en passant par Heinrich Wölfflin et P. Franckl. Sa dimension symbolique a servi à éclairer la vision du monde de différentes cultures et de différents moments de la culture, à travers le monde formel de l'architecture et des architectures (de Riegl et Worringer à Spengler et Giedion). Enfin, sa dimension polémique a intégré le concept d'espace dans la théorie de l'architecture du mouvement moderne. D'autre part, d'un point de vue critique, on tentera d'apprécier le rôle de la notion d'espace dans la recherche architecturale. On se demandera, en particulier, si un procès involutif ne minerait pas l'architecture qui, au profit de nouveaux objectifs médiatiques, semble opérer un retour réducteur au dessin et renoncer à la création de l'espace-temps rêvé par les C.I.A.M. (Congrès internationaux d'architecture moderne).

Généalogie : de l'architecture art du dessin à l'architecture art de l'espace

Selon le Dictionnaire universel (1690) de Furetière, espace[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-VIII
  • : professeur à l'institut supérieur Saint-Luc, Bruxelles
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Médias

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