ESPACE (CONQUÊTE DE L') Des fusées aux lanceurs
L'ère des lanceurs spatiaux
Aucune activité spatiale ne peut se dérouler sans disposer d'un moyen d'accès à l'espace. C'est donc la première des tâches auxquelles furent confrontés les pays qui, après la Seconde Guerre mondiale, commencèrent à afficher des ambitions dans ce domaine, à savoir les États-Unis et l'Union soviétique. Mais vaincre la pesanteur s'annonçait être un terrible défi, car envoyer quelques kilogrammes et, a fortiori, quelques centaines de kilogrammes dans l'espace exigeait de maîtriser de nombreuses technologies.
L'avènement de la fusée moderne
La première fusée moderne est en fait née au cours de la Seconde Guerre mondiale, avec le V2 (Vergeltungswaffe no 2 : « arme de représailles no 2 ») allemand, conçu à Peenemünde, sur les bords de la mer Baltique, sous l'autorité de Wernher von Braun, opérant au sein de l'armée de terre. Il s'agit alors de réaliser un missile capable d'emporter une tonne d'explosif sur une distance de l'ordre de 300 kilomètres. De 1937 à 1942, les grands concepts de propulsion, de guidage, de pilotage, d'aérodynamique et de conception générale des fusées encore aujourd'hui utilisés verront le jour et seront retenus pour le V2, qui réussira son premier vol le 3 octobre 1942. À partir de 1944, plusieurs milliers de ces missiles seront tirés sur Paris, Londres, les villes du nord de la France et le port d'Anvers, faisant d'importants dégâts et des milliers de morts. Le V2 se présente alors sous la forme d'un engin de 12 tonnes disposant d'un seul étage et d'un moteur de 26 tonnes de poussée fonctionnant à l'oxygène liquide et à l'alcool.
La constitution des arsenaux stratégiques de la guerre froide
En 1945, les puissances victorieuses de l'Allemagne héritent du savoir-faire nazi. Alors que la guerre froide s'instaure, la priorité est accordée à la réalisation de missiles balistiques porteurs de l'arme nucléaire. Il s'agit d'abord de missiles capables de franchir quelques centaines de kilomètres, puis, vers 1955, de missiles dits à portée intermédiaire (de 2 500 à 3 000 km). Par rapport au V2, divers progrès technologiques sont réalisés. La poussée des moteurs est portée à environ 150 tonnes. Les ergols utilisés se diversifient : kérosène et oxygène liquide, acide nitrique et kérosène, ergols stockables – c'est-à-dire capables de rester stockés pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, dans les réservoirs des missiles (il s'agit d'ergols le plus souvent à base de composés d'hydrazine et de peroxyde d'azote) ; ce caractère stockable constitue évidemment une condition indispensable pour assurer une réaction la plus rapide possible en cas d'attaque nucléaire adverse. Dans cette catégorie de missiles de portée intermédiaire se placent les engins américains Jupiter et Thor et, du côté soviétique, les SS-4 et SS-5, ne comportant tous qu'un seul étage.
L'objectif final reste la portée intercontinentale, permettant aux missiles d'atteindre le cœur même du territoire ennemi, c'est-à-dire des objectifs situés à plus de 6 000 kilomètres de leur point de lancement. Les Soviétiques sont les premiers, en août 1957, à mettre au point un tel engin, la R-7 Semiorka, qui leur permet de mettre New York et Washington à portée de leurs armes thermonucléaires. Le concept de la R-7 est tout à fait révolutionnaire : il s'agit d'une fusée à deux étages, mais ceux-ci ne sont pas disposés l'un au-dessus de l'autre mais en « fagot », quatre propulseurs entourant un propulseur central, chacun de ces cinq propulseurs étant doté d'un moteur-fusée à quatre chambres de combustion à kérosène et à oxygène liquide. Avec une telle configuration, ce missile, d'une masse de 267 tonnes au décollage, bénéficie[...]
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Écrit par
- Frederick I. ORDWAY III : consultant, Alabama Space and Rocket Center, Huntsville, États-Unis
- Jacques VILLAIN : membre de l'Académie de l'air et de l'espace et de l'International Academy of Astronautics, ancien président de l'Institut français d'histoire de l'espace
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