ESPACE (CONQUÊTE DE L') La militarisation de l'espace
Le 17 avril 2007, un lanceur ukrainien Dniepr décolle de la base de Baïkonour, au Kazakhstan, et met sur orbite le premier satellite de reconnaissance militaire égyptien, MisrSat-1, alias Egyptsat-1. Ce fait, a priori banal dans un monde où les satellites ont envahi notre quotidien, a en réalité marqué une véritable rupture avec les cinquante dernières années, rupture dont les prémices sont apparues au milieu des années 1990. La mondialisation de l'espace militaire est en marche, et l'espace devient une composante indissociable des activités militaires, notamment en matière de renseignement.
Un espace militaire en révolution
Le demi-siècle passé, dominé par la guerre froide exacerbée par la rivalité politique et idéologique entre l'Est et l'Ouest, a laissé l'image d'un monde dans lequel l'espace militaire a été – et semble encore – monopolisé par les États-Unis et l'Union soviétique, devenue la Russie en 1991. Or, depuis la fin de cette guerre froide, plus d'une douzaine de pays – Chine, Royaume-Uni, Israël, France, Inde, Japon, Allemagne, Italie, Pakistan, Taïwan, Arabie Saoudite, Corée du Sud, Égypte – ont lancé ou font lancer par d'autres des satellites de reconnaissance leur conférant une quasi-autonomie en matière de renseignement.
Le monopole américano-russe concernant l'espionnage à partir de l'espace s'est donc ainsi peu à peu fissuré. En outre, alors que naguère les satellites militaires n'étaient lancés que par leur propriétaire, ce n'est plus le cas aujourd'hui. À titre d'exemple, la Russie met sur orbite des satellites militaires allemands ou d'autres nations à partir de Baïkonour, situé au Kazakhstan !
Par ailleurs, deux événements importants sont intervenus récemment, non plus dans le domaine de l'observation, mais dans celui des armes spatiales proprement dites. En effet, le 11 janvier 2007, la Chine a procédé – à titre de démonstration – à la destruction, au moyen d'un missile balistique lancé du sol, de son satellite de météorologie FY-1C, lancé le 10 mai 1999 et gravitant à 850 kilomètres d'altitude, révélant sa compétence inattendue en la matière. Cette démonstration arrivait après une autre réalisée en 2006 : l'aveuglement par un laser chinois des capteurs d'un satellite-espion américain KH-11. Puis, le 20 février 2008, l'U.S. Navy, sans doute pour rappeler à la Chine qu'elle aussi est capable d'intercepter des satellites, procédait à la destruction, au-dessus du Pacifique, de son satellite militaire de reconnaissance radar N.R.O.-21, situé sur une orbite de 247 kilomètres d'altitude, et qui était devenu incontrôlable. Pour cela, la Navy a tiré un missile antimissile balistique modifié S.M.-3 à partir du croiseur U.S.S. Lake Erie.
Enfin, le 11 février 2008, dans une allocution faite à Kourou (Guyane), le président français Nicolas Sarkozy mettait en évidence le décalage entre les États-Unis et l'Europe en matière de budgets spatiaux militaires et incitait cette dernière à faire un effort dans ce domaine. Depuis quelques années, le monde spatial militaire est donc en pleine mutation.
Rappelons que de la fin des années 1950 jusqu'à la fin de la guerre froide, l'espace militaire a été monopolisé par les États-Unis et l'Union soviétique, qui y ont déployé des systèmes passifs – comme les satellites de reconnaissance, d'écoute, de communication, de navigation – mais aussi des armes destinées à porter le combat dans l'espace. À la militarisation de ce dernier s'est ainsi ajoutée une « arsenalisation » (weaponization, en anglais). Cependant, ce déploiement ne concerne qu'un nombre limité de systèmes, et, souvent, de façon limitée dans le temps.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jacques VILLAIN : membre de l'Académie de l'air et de l'espace et de l'International Academy of Astronautics, ancien président de l'Institut français d'histoire de l'espace
Classification
Autres références
-
ACCÉLÉROMÈTRES SPATIAUX
- Écrit par Raphaël F. GARCIA et Pierre TOUBOUL
- 4 883 mots
- 3 médias
Le 17 mars 2009, un lanceur germano-russe Rockot décolle du cosmodrome de Plesetsk, dans le nord de la Russie, non loin du cercle polaire, et injecte sur une orbite terrestre très basse Goce, premier des satellites Earth Explorer du programme Living Planet de l'Agence spatiale européenne (E.S.A.)....
-
ALDRIN EDWIN EUGENE dit BUZZ (1930- )
- Écrit par Jacques VILLAIN
- 711 mots
- 1 média
Deuxième homme à avoir foulé le sol de la Lune, après Neil A. Armstrong, l'Américain Edwin Eugene (« Buzz ») Aldrin, Jr. naît le 20 janvier 1930 à Montclair, dans le New Jersey. En 1951, il devient bachelor ès sciences de l'Académie militaire des États-Unis à West Point. L'année suivante, il devient...
-
ARMSTRONG NEIL ALDEN (1930-2012)
- Écrit par Jacques VILLAIN
- 1 035 mots
- 3 médias
Premier homme à avoir foulé le sol de la Lune, l'Américain Neil Alden Armstrong naît le 5 août 1930 à Wapakoneta, dans l'Ohio. Très tôt attiré par l'aviation, il obtient en 1946, à l'âge de seize ans, son brevet de pilote, avant même d'avoir le permis de conduire les automobiles. En 1947, il termine...
-
ASTRONOMIE
- Écrit par James LEQUEUX
- 11 339 mots
- 20 médias
Le prodigieux développement de l'astronomie spatiale va permettre l'exploration directe de presque tout le système solaire, notamment avec les sondes américaines Pioneer-10 (lancée en 1972) et Pioneer-11 (lancée en 1973), Mariner-10 (lancée en 1973), Viking-1 et Viking-2 (lancées en 1975), Voyager-1... - Afficher les 93 références