ESPAGNE (Le territoire et les hommes) Économie
Capitale | Madrid |
Unité monétaire | Euro (EUR) |
Population (estim.) |
48 736 000 (2024) |
R.N.B. par habitant (USD) |
31 680 $ (2022) |
2010-2012 : spéculation contre la dette souveraine espagnole
C'est en toute logique qu’une nouvelle crise, cette fois de nature budgétaire, frappe l’Espagne à partir de 2010. Les équilibres budgétaires sont fragilisés par le « plan Emploi », par la croissance des dépenses sociales (la sécurité sociale entre en déficit) et par la baisse des recettes fiscales. Pour financer son déficit, l’État espagnol est obligé de s’endetter sur les marchés financiers mondiaux et l'encours de la dette publique grimpe : de 36 p. 100 du P.I.B. en 2007 à 74 p. 100 du P.I.B. en 2010. L'endettement de l’État vient s’ajouter à un fort endettement des banques (85 p. 100 du P.I.B.), des ménages (136 p. 100 du P.I.B.) et des entreprises (75 p. 100 du P.I.B.)… Au total, l’Espagne doit une valeur égale à près de trois fois et demi son P.I.B. En 2010, environ 40 p. 100 de ces emprunts sont déjà dans la main d’investisseurs et de fonds de pension étrangers.
Les marchés internationaux profitent de ce contexte pour lancer plusieurs vagues d'attaque spéculative contre l'Espagne, et ce, dès l'été 2010, puis tout au long de l'année 2011 et jusqu'au printemps 2012. Les agences de notation Standard and Poor’s, Moody’s et Fitch s’alignent sur l’opinion des médias internationaux et reprennent à leur compte les jugements sévères sur l’Espagne qu'émettent les institutions internationales (F.M.I., B.C.E, Banque mondiale et O.C.D.E.). En juin 2010, le Financial Times annonce que l’Espagne est au bord de la cessation de paiement, tout en conspuant le modèle économique que le quotidien encensait quelques années plus tôt. Cette annonce mensongère donne le coup d'envoi d'un véritable pilonnage médiatique du modèle économique espagnol dans la presse anglo-saxonne. L'Espagne est associée aux autres pays du sud de la Méditerranée très endettés. Les termes Spanic,Pigs (Portugal, Italy, Greece, Spain), Stupid (Spain, Turkey, Portugal, Italy, Dubaï) se répandent dans la presse. La note de la dette souveraine de l’Espagne avait déjà été abaissée de AAA à AA+ en mars 2009. Elle poursuit sa dégradation. Pendant l'hiver 2011, le différentiel entre le taux d’intérêt de la dette espagnole et le taux d’intérêt de la dette du gouvernement allemand (qui exprime le « risque » perçu par un investisseur pour prêter à l'Espagne ou prime de risque) atteint 2,5 points, avant de s'envoler au cours du premier semestre 2012. Cette attaque spéculative contraint le gouvernement à se tourner vers l'Union européenne (sans qu’on parle officiellement de sauvetage).
2012 : L'Europe au secours des finances espagnoles
À partir du printemps 2012, les chefs d’État européens organisent une mobilisation politique intense pour sauver l'euro. Le nouveau président du gouvernement, Mariano Rajoy, obtient l'assurance que le refinancement de la dette sera sécurisé par une opération qui consolidera en même temps les banques espagnoles. La Banque centrale européenne émet des eurobons en direction des établissements financiers espagnols, qui accordent alors des prêts à l'administration espagnole. En contrepartie, Mariano Rajoy poursuit et renforce les réformes de structure pour contenir la progression de la dette et satisfaire les objectifs du pacte de stabilité européen (atteindre 3 p. 100 de déficit public en 2014, ce qui est un horizon de l'action publique, mais qui est très largement dépassé dans les faits). En janvier 2012, le gouvernement avait déjà, sous la pression de la spéculation, lancé un plan de plus de 65 milliards d'économie avec quelques mesures phares : passage du principal taux de TVA de 18 à 21 p. 100, hausse des cotisations sociales, baisse des salaires des fonctionnaires… D'autres mesures drastiques sont mises en œuvre[...]
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Écrit par
- Nacima BARON : professeure des Universités, agrégée de géographie, habilitée à diriger des recherches
- Sabine LE BAYON : économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (O.F.C.E.)
Classification
Médias