CHOC ÉTAT DE
La résistance de l'homme aux conditions hostiles a toujours suscité l'étonnement, la curiosité et l'admiration. Il revient au physiologiste américain W. B. Cannon (1871-1945) d'avoir montré que cette résistance se fonde sur des mécanismes régulateurs neuroendocriniens complexes et délicats, ayant pour effet de préserver la stabilité de ce que Claude Bernard a appelé le milieu intérieur.
Pour Cannon, l'adaptation de l'organisme à l'agression devait aussi passer par le maintien de l'« homéostasie », c'est-à-dire des conditions physiologiques normales, que tend à perturber le facteur traumatisant. Cet état de perturbation plus ou moins profond constitue le « choc ».
Que celui-ci puisse être extrêmement varié, en fonction du degré de sensibilité des sujets, de la qualité et de l'intensité de leurs réactions adaptatives et que, par conséquent, on préfère souvent parler de malades ou de blessés « choqués » plutôt que de choc, c'est ce qui se dégage des innombrables travaux menés depuis la dernière guerre. L'influence de la constitution humorale et celle de l'équilibre neuro-végétatif, soulignés respectivement par Selye, Reilly et Laborit, rendent compte de ce comportement individuellement variable des organismes face aux agressions dont ils sont victimes. L'atteinte de l'état général, chez des sujets choqués, pose donc toujours des problèmes particuliers et toujours graves, car le médecin est en présence de malades dont les troubles signalent l'imminence d'une issue fatale.
Aussi, d'urgence, devra-t-il prendre les décisions thérapeutiques nécessaires ; s'il est trop tard, l'état de choc devenu irréversible ne permettra plus de sauver le patient.
Caractères généraux
L'état de choc est caractérisé par l'association d'un état clinique et de profondes perturbations biologiques qui sont à la fois la conséquence d'une agression intense et prolongée et celle des mécanismes de défense de l'organisme, destinés pourtant à lutter contre cette agression, mais qui entraînent finalement des désordres graves indépendants de l'agression initiale.
Le choc tel qu'on l'observe habituellement comporte des troubles circulatoires, des signes cliniques de souffrance générale et des anomalies biologiques. Les troubles circulatoires sont ceux d'un collapsus cardio-vasculaire : effondrement tensionnel, stase veineuse avec ralentissement de la circulation de retour, tachycardie extrême. Le sujet atteint est pâle, souvent cyanosé : ses téguments sont froids, sa respiration est rapide et superficielle ; il est inerte, prostré, mais, sauf éventualité d'un traumatisme crânien associé, garde une conscience intacte ; ses réflexes sont abolis ou très diminués ; la diurèse est faible ou nulle. Il existe habituellement une hémoconcentration, une acidose et une hyperazotémie.
L'évolution d'un état de choc se fait presque toujours en deux temps. Le « choc primaire » est caractérisé par l'association d'un « état de détresse » où s'imbriquent les signes propres de l'agression en cause ( hémorragie, traumatisme accidentel ou opératoire, écrasement, infection grave, etc.) et des signes de réaction (adrénalino-sécrétion, vaso-constriction périphérique, diminution du débit cardiaque et du retour veineux). Cette phase est, en principe, facilement réversible si des mesures thérapeutiques appropriées sont prises avant un certain délai qui varie selon les cas. Si ces mesures ne sont pas prises ou si elles sont prises trop tard, l'évolution se fait vers la seconde phase, ou « choc secondaire », seul vrai état de choc, beaucoup plus difficilement réversible. Il s'agit donc d'un phénomène commun, non spécifique, qui après une phase de latence succède à un état de détresse d'étiologie variable.[...]
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Écrit par
- Geneviève LABORIT : médecin-anesthésiste des Hôpitaux de Paris
- Henri LABORIT : chirurgien des hôpitaux de Paris
- Jean PAUPE : professeur de médecine expérimentale, chef du service d'immuno-allergologie infantile à l'hôpital Necker-Enfants malades
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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