ÉTAT DE LA MATIÈRE, notion d'
Phénomènes quantiques et transitions de phase
À basses températures apparaissent des états dont les propriétés extrêmes pourraient avoir un impact important sur les technologies futures. La supraconductivité est le phénomène de parfaite conduction électrique qu'on peut observer pour de nombreux solides. Découverte d'abord à extrêmement basse température (de l'ordre de quelques kelvins [0 K ≈ – 273 0C]), cette propriété a été ensuite observée dans certains matériaux à des températures plus facilement accessibles. La superfluidité est la disparition de la viscosité de quelques liquides formés par des atomes d'hélium. Ces deux comportements sont qualitativement expliqués par la prise en compte de phénomènes collectifs quantiques.
Signalons enfin des états surprenants dont l'existence est maintenant communément admise par les scientifiques, mais dont la compréhension est loin d'être achevée. Le condensat de Bose-Einstein est l'état de certains systèmes atomiques à des températures inférieures au microkelvin. À l'autre bout de l'échelle des températures, le plasma de quarks et de gluons – analogue pour les interactions nucléaires à l'état du plasma pour les interactions électromagnétiques – est l'état de la matière où quarks et gluons ne sont plus confinés en protons et neutrons, mais agissent collectivement. Cet état pourrait avoir existé au tout début de l'Univers, une microseconde après l'explosion primordiale.
L'étude de la solidification ou de la vaporisation de l'eau, et plus généralement des changements d'état, a permis de construire une théorie générale de ces transitions de phase. Depuis les travaux de Paul Ehrenfest (1933), on les classe en deux types. Les transitions du premier ordre, la fusion et la vaporisation par exemple, s'accompagnent d'une discontinuité de l'entropie, ce qui se traduit par l'existence d'une chaleur latente de transformation. Elles sont caractérisées par le fait que, au point de transition, les deux phases en présence sont en équilibre. Celles du second ordre, comme les transitions magnétiques et les transitions superfluide et supraconductrice, sont sans chaleur latente. Elles sont le signe d'un changement de symétrie, auquel est associée la notion de paramètre d'ordre ; le groupe de symétrie de l'état le moins symétrique est un sous-groupe du groupe de symétrie de l'état le plus symétrique. À la suite des travaux de Lev Landau et Lars Onsager, Ken Wilson a établi en 1972 une théorie mathématique des changements d'état dans le cadre de l'étude des phénomènes critiques.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
Classification