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ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) La littérature

La littérature afro-américaine

La littérature afro-américaine ‒ ou « noire » américaine ‒ comprend les textes écrits par les esclaves et leurs descendants, nés sur le sol américain. Définis par leur « race », ces écrivains ont produit des ouvrages nécessairement politiques, souvent engagés, qui épousent les soubresauts de la condition et de l’histoire de la minorité noire aux États-Unis : esclavage, ségrégation, mouvement des droits civiques, racisme endémique, incarcération de masse, et cela malgré l’avènement d’une bourgeoisie noire. Ils puisent dans cette culture pour promouvoir une esthétique qui leur soit propre.

Une parole politique

Le Noir américain est une construction du Nouveau Monde avec, pour scène primitive, la traversée de l’océan Atlantique sur les navires négriers depuis l’Afrique des origines. Cette histoire interdite, une des amnésies des États-Unis, fait retour dans toute sa littérature et se raconte précisément dans les textes noirs. Un autre tabou pèse sur la genèse des lettres noires : les esclaves étaient interdits d’écriture et de lecture par leurs maîtres, parfois sous peine de mort. Tout d’abord viennent donc les récits d’esclaves confiés à des abolitionnistes blancs. Mais rapidement, les récits sont écrits de la main même de l’auteur : l’esclave se fait écrivain, auteur de sa propre vie. Pour autant, le leurre serait d’aborder cette littérature comme autant de témoignages de la condition noire, à la manière de traités sociologiques. Une esthétique propre la caractérise, qui trouve ses racines dans la culture noire américaine : langage vernaculaire, folklore, musique, chants et sermons. La publication en 1992 de l’anthologie Norton de littérature africaine américaine de Henry Louis Gates, Jr. a permis d’établir un canon des lettres noires. Échos, correspondances et influences croisées donnent aux textes la visibilité nécessaire au développement d’une critique littéraire afro-américaine.

Cette littérature est bien le miroir d’une histoire américaine scandée par l’esclavage, la Reconstruction qui suit la guerre de Sécession, puis l’industrialisation et les vagues migratoires vers le Nord, la fin de la ségrégation, les luttes pour les droits civiques et l’ère Obama. Lors de la Première Guerre mondiale, les troupes noires américaines apportent avec elles le jazz en Europe ; à leur retour, le Jazz Age voit éclore, à Harlem principalement, une Renaissance noire, mouvement littéraire et artistique sans précédent, qui proclame la naissance du « nouveau Nègre » (1925). La Seconde Guerre mondiale débouche sur le réalisme de Richard Wright et son exil en Europe : il définit une littérature de la protestation que contestera un autre expatrié, James Baldwin. Quant à la décennie des droits civiques (1955-1965), elle porte enfin les revendications des Noirs au premier plan de la scène politique : les prises de positions se figent entre réformistes et révolutionnaires, à l’instar de l’opposition historique entre ségrégationnistes et intégrationnistes. On voit alors naître le Black Arts Movement (BAM), pendant esthétique du mouvement noir nationaliste, le Black Power (« pouvoir noir »). L’« esthétique noire » (Black Aesthetics) énonce ses règles. Les années 1980 seront l’occasion d’une nouvelle renaissance des lettres noires, impulsée en partie par le mouvement féministe. Une pléiade d’écrivaines se partagent le devant de la scène, rejetant dans l’ombre leurs homologues masculins (Ishmael Reed, John Edgar Wideman). Toni Morrison reçoit le prix Nobel de littérature en 1993. Alice Walker poursuit une œuvre puissante. Au début du xxie siècle, la tradition noire américaine s’enrichit des textes d’écrivains africains nés aux États-Unis, alors que les violences policières et les meurtres de jeunes Noirs font voler en éclat le rêve d’une[...]

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