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ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) Les arts plastiques

Vers un art américain (1900-1960)

Le tournant du xxe siècle voit la transformation des États-Unis en puissance impériale. Jusque-là occupé à explorer l'ensemble de son territoire et à assurer son unité politique, le pays se dote des attributs de la puissance internationale, colonies comprises. La rivalité avec les grandes puissances européennes ira augmentant au cours du siècle, pour aboutir, à l'issue des deux guerres mondiales, à une large domination de l'influence américaine, qui lui donnera finalement l'occasion d'agir directement sur le destin du Vieux Continent. Ce changement entraîne dès son apparition une redéfinition progressive de l'américanité dans le domaine artistique. La question prend une place de premier plan, dès lors que la puissance culturelle apparaît comme le corollaire nécessaire de la puissance économique, militaire et politique. Elle se complique cependant, parce que le caractère récent du pays et sa traditionnelle réticence à l'égard de ce qui peut apparaître comme un luxe inutile lui font courir le risque du provincialisme : l'horizon d'attente du public américain à l'égard de l'art est fortement limité, y compris dans la métropole cosmopolite que devient rapidement New York. Les artistes vont alors s'efforcer de concilier tant bien que mal la spécificité américaine et leur insertion dans le monde de l'art international.

Le premier modernisme

De ce point de vue, l'introduction du modèle avant-gardiste du modernisme à partir des premières expositions américaines des impressionnistes français, au milieu des années 1880, va avoir un effet paradoxal, quoique déterminant. Il impose en effet, comme condition de reconnaissance internationale, l'affirmation des spécificités – aussi bien celle du médium que celle de l'individualité du créateur, voire de son appartenance nationale. En même temps, il pose des standards importés de l'Europe, en termes de style aussi bien que d'organisation. Alors même que l'art est trop mal considéré par l'ensemble de la société pour avoir donné naissance à une version officielle et cela malgré l'existence de plusieurs académies locales au cours du xixe siècle, celles-ci n'ayant jamais occupé la position normative de leurs modèles français ou européens, des organisations vont se constituer, pour la photographie puis pour la peinture, qui rompent avec un académisme que leurs propres chefs de file avaient contribué à instituer.

En 1896, Alfred Stieglitz avait été l'un des artisans de la fusion de plusieurs sociétés de photographes en une large organisation, le Camera Club de New York. C'est pourtant lui qui, en 1902, opère une scission qu'il baptise, sur les modèles autrichiens et allemands, « Photo-Secession », et à laquelle s'agrègent des personnalités comme Edward Steichen. Dotée d'une ligne esthétique offensive et cohérente, celle du pictorialisme dans un premier temps, le mouvement est défendu par la revue Camera Work, publiée de 1903 à 1917. De manière similaire, c'est dès l'apparition de la première académie à vocation nationale, à la suite de l'absorption en 1906 de la Société des artistes américains (Society of American Artists) par l'Académie nationale du dessin (National Academy of Design), que l'un de ses membres, Robert Henri, décide de s'y opposer en organisant une exposition d'artistes refusés par la nouvelle institution, avec principalement des représentants de « l'École de la poubelle » (AshcanSchool) originaires de Philadelphie, tels John Sloan et William Glackens. En 1908, l'exposition du groupe des Huit (The Eight), à la galerie Macbeth de New York, avec le scandale qu'elle suscite, est ainsi le premier épisode avant-gardiste de l'histoire de la peinture américaine. L'apport[...]

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Écrit par

  • : professeur d'art et littérature des États-Unis à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot
  • : professeur d'histoire de l'art, École normale supérieure de Lyon, directeur de l'Institut national d'histoire de l'art, Paris
  • : maître de conférences en histoire de l'art contemporain à l'université de Valenciennes, critique d'art, commissaire d'expositions
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Médias

Portrait de George Washington, G. Stuart - crédits : Courtesy, Museum of Fine Arts, Boston, États-Unis. William Francis Warden Fund, John H. and Ernestine A. Payne Fund, Commonwealth Cultural Preservation Trust

Portrait de George Washington, G. Stuart

<em>La Course des frères Biglin</em>, T. Eakins - crédits : courtesy National Galery of Art, Washington

La Course des frères Biglin, T. Eakins

<it>Lady Agnew of Lochnaw</it>, J. S. Sargent - crédits :  Bridgeman Images

Lady Agnew of Lochnaw, J. S. Sargent