ETHNOLOGIE Ethnomusicologie
L'ethnomusicologie étudie la musique des divers groupes ethniques et communautés culturelles du monde entier. Oscillant, au cours de son histoire, entre l'analyse scientifique des systèmes musicaux et la description ethnographique des contextes socioculturels dans lesquels se situent ces musiques, l'ethnomusicologie est non seulement une branche de la musicologie, mais aussi de l'anthropologie ou de l'ethnologie.
Par les questions qu'elle suscite, l'ethnomusicologie joue un rôle tout à fait spécifique vis-à-vis de la musicologie traditionnelle, car elle oblige à relativiser – en soulignant la spécificité de notre culture – les œuvres et les pratiques musicales occidentales. En ce sens, l'ethnomusicologie participe à la construction progressive d'une musicologie générale.
Historique de la discipline
L'ethnomusicologie a un peu plus d'un siècle, puisqu'on s'accorde, malgré les observations ou les travaux de Jean-Jacques Rousseau (1768), du père Amiot (1779), de William Jones (1784) et de Guillaume Villoteau (1816), à considérer l'article d'Alexander John Ellis (1884) consacré à l'analyse des échelles non harmoniques, c'est-à-dire étrangères à notre culture occidentale, comme le premier travail d'ethnomusicologie. En 1882, l'Allemand Theodor Baker avait publié sa thèse sur « Les Sauvages de l'Amérique du Nord », monographie entièrement consacrée à la musique des Indiens Seneca (État de New York), où l'on trouve déjà aussi bien des observations ethnographiques que des transcriptions musicales directement réalisées sur le terrain.
Le travail de ceux qu'on appellera beaucoup plus tard les ethnomusicologues est grandement simplifié lorsque apparaissent les moyens mécaniques d'enregistrement. En 1889, l'anthropologue Walter Fewkes réalise les premiers chez les Indiens Zuni de Passamaquoddy et, en 1902, Carl Stumpf crée les premières archives de musique non occidentale à l'institut psychologique de l'université de Berlin.
L'existence d'archives et d'enregistrements incite un certain nombre d'ethnomusicologues, surtout en Europe, à travailler d'abord à partir de la musique collectée par d'autres ; ainsi, Benjamin Ives Gilman, en 1891, transcrit et analyse les enregistrements de Fewkes.
L'école de Berlin
À la fin du xixe siècle et au début du xxe, avec Carl Stumpf, Otto Abraham et Erich M. von Hornbostel, apparaît la première école ethnomusicologique : l'école de Berlin. Ces chercheurs s'intéressent aux processus mentaux impliqués par la musique (la psychologie est, à l'époque, la reine des sciences humaines) en se fondant sur l'analyse des hauteurs et de la mélodie, sur les systèmes d'accordage et la mesure des échelles et des instruments. Les objectifs sont essentiellement comparatifs, et l'on dénomme alors la discipline vergleichende Musikwissenschaft, musicologie comparée. Hornbostel établit avec Curt Sachs la première grande classification de tous les instruments connus dans le monde, posant ainsi les fondements de l'une des branches de l'ethnomusicologie, l'organologie, qui répartit aujourd'hui les instruments entre idiophones, membranophones, cordophones et aérophones. Ils s'inspirent de la Kulturkreislehre des anthropologues Fritz Groebner et Wilhelm Schmidt pour étudier la diffusion des instruments et des traits culturels musicaux à travers le monde. Curt Sachs développe un type d'approche très en vogue au début du siècle : il isole un trait caractéristique dont il étudie les manifestations dans le monde entier. Sur la base de ces comparaisons, il propose une théorie de l'évolution musicale. Ce genre de spéculations historiques se prolongeait encore dans les années soixante, notamment dans l'analyse des échelles (par exemple les[...]
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Écrit par
- Jean-Jacques NATTIEZ : professeur titulaire de musicologie
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Médias
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