Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ÉTOILES

Article modifié le

Formation des étoiles

Dans notre Galaxie, la majeure partie de la matière du milieu interstellaire est condensée en nuages interstellaires ; ces nuages sont de deux types :

– les nuages diffus, constitués d'hydrogène atomique neutre (régions H I), de densité relativement faible (de l'ordre de 10—2 à 10—1 atome par mètre cube) ; leur température est voisine de 100 K ;

Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

– les nuages denses, qui contiennent des poussières et de nombreuses molécules ; leur densité est plus élevée, de 10—1 à 102 particules par mètre cube ; leur température est voisine de 10 K ; c'est dans cette dernière catégorie que se rangent les nuages sombres, les globules de Bok et les nuages moléculaires, sites de la formation des étoiles.

La théorie de la formation stellaire est en plein développement depuis les années 1980 et plusieurs mécanismes ont été proposés. Un des plus couramment admis peut être schématisé de la façon suivante.

À la suite de l'accrétion de plusieurs petits nuages, la pression interne (thermique et turbulente) d'un nuage peut devenir insuffisante pour contrebalancer les forces d'autogravitation : le nuage commence à se contracter. Cette contraction peut également être déclenchée par le passage de l'onde de choc qui accompagne l'onde de densité (onde qui – selon la théorie de Lin et Shu – est responsable de la structure des galaxies spirales) et se propage dans le milieu interstellaire. Au cours de la contraction, le nuage se fragmente. Les fragments de masse supérieure à quelques masses solaires se condensent à leur tour et vont former des étoiles.

Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

Certains détails de ces mécanismes restent encore flous. Pour être acceptable, la théorie doit en particulier rendre compte du taux de formation d'étoiles et de la distribution observée de la masse des étoiles.

Un nuage est susceptible de s'effondrer sous l'effet des forces d'autogravitation si son énergie gravitationnelle est, en valeur absolue, supérieure à son énergie thermique. Pour une température T, une densité ρ et un poids moléculaire μ donnés, cela se produit quand la masse d'un nuage (supposé sphérique) dépasse la valeur critique donnée par le critère de Jeans :

Mc est exprimée en masses solaires (1 M⊙ : environ 2 × 1030 kg). Dans cette expression, ζ est toujours voisin de 4 × 10—11. Les nuages diffus de masse supérieure ou égale à 103M⊙ sont gravitationnellement instables. Quant aux nuages denses, les conditions d'instabilité sont réunies dès que leurs masses atteignent quelques masses solaires. Cependant, les nuages denses sont rarement sphériques et la présence éventuelle d'un champ magnétique et d'un moment angulaire vient considérablement compliquer l'analyse. Le taux de formation d'étoiles dépend en partie de l'estimation de la masse critique Mc et du nombre des nuages qui atteignent cette masse par unité de temps.

Plusieurs auteurs ont décrit la fragmentation d'un nuage en l'assimilant à un processus aléatoire ou bien encore hiérarchisé, chaque étape de la fragmentation conduisant à la même masse totale d'étoiles. Cette dernière hypothèse rend assez bien compte de la distribution de masse des étoiles entre 1 M⊙ et 5 M⊙ mais sous-estime la proportion des étoiles plus massives.

Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

La formation des molécules dans un nuage peut conduire à sa fragmentation. Les molécules ne peuvent se former que lorsque la densité, à la suite de la contraction globale du nuage, a atteint une valeur suffisamment élevée (plusieurs atomes par mètre cube). La formation de molécules comme H2 réduit le nombre de particules libres présentes dans le gaz, et donc la pression de ce dernier. Des instabilités de pression locales peuvent prendre naissance et se développer.

Les molécules se forment surtout sur les grains de poussière (lorsqu'ils sont assez froids, T de l'ordre de 10 K) présents dans le nuage. L'efficacité de la formation de molécules sur les grains varie beaucoup avec la température de ces derniers. À l'intérieur d'un nuage, cette température présente des fluctuations sur une échelle de longueur correspondant en ordre de grandeur à une profondeur optique (τ) unité. Là où les grains sont légèrement plus froids que la moyenne, la formation de molécules s'accélère ; cependant, recouverts d'une couche moléculaire, les grains se refroidissent plus vite, ce qui contribue à accroître le taux de formation de molécules : le processus s'accélère. Chaque région de dimension voisine de τ = 1 évolue pratiquement indépendamment de ses voisines : le nuage se fragmente.

Ce mécanisme peut rendre compte de la distribution de masse initiale des étoiles. Selon cette théorie, les fragments les plus massifs sont formés à la périphérie du nuage, là où la densité est la moins élevée.

Cœur stellaire d'une proto-étoile - crédits : Encyclopædia Universalis France

Cœur stellaire d'une proto-étoile

De nombreux chercheurs ont entrepris l'étude de la contraction et de l'évolution des fragments ainsi formés. Certains désaccords portent sur la détermination de l'opacité au rayonnement des nuages à basses températures, ainsi que sur le traitement des mouvements de convection et du transfert radiatif. Néanmoins, plusieurs tendances générales peuvent être dégagées. Une région centrale beaucoup plus dense que la périphérie se développe rapidement et attire à elle la matière environnante. Quand la densité centrale atteint environ 1011 particules par centimètre cube, le cœur devient opaque au rayonnement infrarouge émis par les grains. Sa température augmente et la pression devient suffisante pour arrêter son effondrement. Sa masse et sa température (voisines à ce moment de 5 × 10—3M⊙ et 200 K) continuent de s'élever au fur et à mesure qu'il attire le reste de l'enveloppe. Quand la température atteint environ 2 000 K, les molécules H2 se dissocient, ce qui provoque un nouvel effondrement du cœur. Il se forme un second cœur, dont la masse et la température sont alors voisines de 10—3M⊙ et 2 × 104 K ; son rayon est proche de celui du Soleil. Toute la matière contenue dans l'enveloppe peut tomber sur la protoétoile. Cependant, si cette dernière est suffisamment massive, la pression de radiation ou le vent stellaire peuvent arrêter cette chute : on pourrait expliquer ainsi pourquoi l'on n'observe pas d'étoiles de masse supérieure à 100 M⊙. Une fois l'enveloppe complètement accrétée ou dispersée, le cœur, en quelque sorte sorti de son cocon, apparaît comme une étoile qui se rapproche de la séquence principale (fig. 1). On pense que la rotation et le champ magnétique jouent un rôle fondamental dans la formation éventuelle d'un cortège planétaire lors de l'effondrement de l'enveloppe entourant la protoétoile. La durée de l'ensemble de ces phénomènes est de l'ordre d'1 million d'années.

Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

Les propriétés calculées du rayonnement infrarouge émis par l'enveloppe protostellaire sont en accord qualitatif avec les observations dans l'infrarouge (absorption à 3 μm et 10 μm). Quand l'enveloppe a cessé d'être totalement opaque au rayonnement émis par le cœur, les spectres prédits sont voisins de ceux qui sont observés pour les étoiles du type T Tauri.

Un certain nombre d'observations viennent guider les recherches concernant la formation des étoiles.

Les étoiles de type T Tauri, variables irrégulières jeunes, sont rencontrées au voisinage des associations OB (constituées d'étoiles jeunes et chaudes), dont on estime l'âge à 106-107 ans, mais également près des étoiles de Herbig ou dans des nuages opaques. Les caractéristiques du rayonnement reçu de ces étoiles (émission continue, raies de Balmer, excès d'infrarouge) indiquent la présence d'une enveloppe chaude et dense (103 à 106 atomes par mètre cube). Une perte de masse, ou vent stellaire, importante affecte la plupart de ces étoiles de masse relativement faible (M ≤ 2 M⊙). Elles rejoignent la séquence principale suivant les tracés de Hayashi.

Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

Les étoiles de Herbig (exemple : FU Orionis) sont des étoiles variables irrégulières, très jeunes, dont le spectre présente de nombreuses raies d'émission. Elles sont étroitement associées à un nuage dense de matière interstellaire qu'elles illuminent. Leur masse peut être déterminée en déduisant l'intensité de la gravité à leur surface de la forme du profil de certaines raies spectrales (raies de Balmer). Il s'agit d'étoiles de masse supérieure à 2 ou 3 masses solaires qui rejoignent, en équilibre radiatif, la région du diagramme HR appelée séquence principale. Leur âge est compris entre 105 et 106 ans. Elles sont entourées d'une enveloppe de gaz chaud (température voisine de 2 × 104 K), ionisé et en expansion. Certaines observations à la longueur d'onde infrarouge de 10 μm semblent indiquer la présence d'une coquille de poussière dans la partie la plus froide de l'enveloppe.

Les techniques d'observation radio (molécules interstellaires) et infrarouge ont permis un développement rapide de la connaissance des propriétés du milieu dans lequel se forment les étoiles, et des étoiles en formation elles-même, qui sont des sources infrarouges. L'émission des molécules comme CO (à 2,6 mm de longueur d'onde), H2CO, CS, etc. a permis de déterminer la structure et la température (qui peut être inférieure à 10 K) des nuages denses (nuages moléculaires, globules de Bok). Dans beaucoup de ces nuages, on observe des sources infrarouges ponctuelles puissantes dont la plupart sont invisibles dans le domaine optique. L'objet de Becklin-Neugebauer, situé dans la nébuleuse d'Orion, a une luminosité totale plusieurs milliers de fois supérieure à celle du Soleil. L'interférométrie speckle, technique d'observation qui permet d'obtenir une grande résolution angulaire, a révélé la présence d'un cocon de matière dégradant dans l'infrarouge le rayonnement visible et ultraviolet émis par un objet central.

La formation des étoiles dans les galaxies

Dans le schéma esquissé précédemment, l'évolution des nuages compacts joue un rôle déterminant dans le processus d'évolution stellaire. Une approche fructueuse consiste à examiner les propriétés globales des systèmes où se forment ces étoiles : les galaxies.

Les galaxies spirales

Le fait qu'on observe dans des galaxies spirales voisines des étoiles O et B et des régions H II (hydrogène ionisé) témoigne de la formation récente d'étoiles dans ces systèmes. Ces étoiles jeunes forment en fait les bras spiraux de ces galaxies, auxquels sont associés du gaz neutre et des filaments de poussière. Cela suggère l'existence d'un facteur opérant sur la formation stellaire à l'échelle galactique. La théorie des ondes de densité dans les galaxies spirales prévoit l'existence d'ondes de choc qui pourraient stimuler la formation d'étoiles en comprimant le gaz sur leur passage. Mais les bras spiraux de certaines galaxies (en particulier celles qui n'ont pas de compagnon) peuvent avoir une autre origine que les ondes de densité. Plusieurs observations semblent indiquer que la formation d'étoiles peut être un phénomène contagieux. Les étoiles nouvellement formées en un point d'une galaxie peuvent donner naissance à un front d'ionisation qui se propage en comprimant le gaz ambiant ; cette compression peut amorcer la formation de nouvelles étoiles, et ainsi de suite. Les explosions de supernovae peuvent jouer un rôle analogue. Des calculs mettant en œuvre ce processus et tirant parti de la courbe de rotation phénoménologique de certaines galaxies ont permis de reproduire assez facilement leur structure en spirale.

Les galaxies irrégulières

Les Nuages de Magellan offrent l'exemple de galaxies irrégulières dans lesquelles on observe également des étoiles très jeunes de types O et B et des régions H II. Le mécanisme de formation d'étoiles lié aux bras spiraux ne peut être invoqué dans ce cas. En revanche, la région appelée 30 Doradus semble illustrer le mécanisme de formation stellaire contagieuse.

Les galaxies irrégulières paraissent moins riches en éléments lourds (carbone, azote, etc.) que le voisinage du système solaire. Certaines indications font penser que le rapport du nombre d'étoiles massives au nombre d'étoiles de petites masses y est plus élevé. Cela peut refléter le rôle joué par la composition chimique du gaz dans la distribution en masse des étoiles au cours de leur formation. La sous-abondance en éléments lourds, en réduisant le taux de refroidissement du gaz, empêcherait l'effondrement des nuages de petites masses à cause de leur pression interne trop élevée. Les galaxies irrégulières offrent un important champ d'observations nécessaires à une meilleure compréhension du mécanisme de formation stellaire.

Les galaxies elliptiques

Il ne reste pas suffisamment de gaz dans les galaxies elliptiques pour entretenir la formation d'étoiles. La morphologie de ces galaxies ne peut être comprise que si l'on suppose soit qu'elles se sont formées à partir d'étoiles ou d'amas d'étoiles préexistants, soit que la formation d'étoiles a accompagné l'effondrement à grande échelle du gaz par lequel ces galaxies se sont formées. Des effets jouant sur l'environnement, tels les vents galactiques ou intergalactiques, ont également pu jouer un rôle déterminant en arrachant une fraction importante du gaz contenu dans ces galaxies. L'étude des étoiles de différentes compositions chimiques peut permettre de retracer l'histoire de la formation stellaire dans un passé lointain.

Accédez à l'intégralité de nos articles

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Médias

Évolution des étoiles - crédits : Planeta Actimedia S.A.© Encyclopædia Universalis France pour la version française.

Évolution des étoiles

Reste de supernova N 63A - crédits : NASA/ ESA/ HEIC & The Hubble Heritage

Reste de supernova N 63A

Étoiles les plus proches - crédits : Encyclopædia Universalis France

Étoiles les plus proches

Autres références

  • PREMIÈRE DÉTERMINATION DE LA DISTANCE D'UNE ÉTOILE

    • Écrit par
    • 338 mots
    • 1 média

    Bien que l'on soit depuis longtemps convaincu que les étoiles sont très éloignées, toutes les tentatives pour évaluer leur distance vont demeurer vaines jusqu'au début du xixe siècle. Le principe de cette mesure est pourtant simple : si l'on parvient à observer, au cours d'une...

  • DÉCOUVERTE DES EXOPLANÈTES

    • Écrit par
    • 666 mots

    La première exoplanète, c’est-à-dire gravitant autour d'une étoile autre que le Soleil, est découverte en 1995 par Michel Mayor et Didier Queloz, de l'Observatoire de Genève, qui présentent les résultats de leurs observations le 6 octobre 1995, lors d'un congrès scientifique à Florence,...

  • ABERRATION ASTRONOMIQUE

    • Écrit par et
    • 983 mots
    • 1 média

    On désigne sous le nom d'aberration un déplacement apparent des astres dû au mouvement relatif de l'observateur et de ces astres, et dont l'origine se trouve dans la valeur finie de la vitesse de la lumière.

    Ce mouvement provient de la rotation de la Terre sur elle-même (aberration...

  • ALMA (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array)

    • Écrit par
    • 2 129 mots
    • 5 médias
    ...en observant finement les collisions entre galaxies, en traçant les propriétés des nuages moléculaires géants qu'elles contiennent et qui aboutissent à la formation des étoiles lors de ces collisions, explore un domaine qui n'est accessible à aucun autre instrument existant de performance comparable....
  • AMBARTZOUMIAN VIKTOR AMAZASPOVITCH (1908-1996)

    • Écrit par
    • 1 036 mots

    Affirmer que la Terre et les êtres vivants sont « poussières d'étoiles », c’est faire référence aux théories sur la naissance et l'évolution des étoiles et sur leur interaction avec le milieu interstellaire dont elles sont issues et auquel elles restituent une partie de la...

  • Afficher les 92 références

Voir aussi