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ORMANDY EUGENE (1899-1985)

Le patriarche de Philadelphie

En 1936, l'Orchestre de Philadelphie fait à nouveau appel à lui pour partager sa direction musicale avec Leopold Stokowski, auquel il succède deux ans plus tard. Pendant quarante-quatre ans, Ormandy fera de cet orchestre l'un des meilleurs du monde, capable de nuances d'une étonnante subtilité, d'un phrasé d'une remarquable finesse et doté d'une palette sonore convenant à tous les répertoires. La qualité des cordes tient naturellement à la formation de violoniste d'Ormandy, dont les coups d’archets sont restés dans la légende. Avant lui, Stokowski avait établi un système de coups d'archets individualisés (plusieurs coups d’archets différents au sein d’un même pupitre afin d’éviter toute rupture du son dans le phrasé). Ormandy est revenu à la tradition du coup d'archet unique, tout en sachant maintenir ce sens du phrasé exceptionnel. Le son qu’il parvient à tirer de cet orchestre tient aussi à la réécriture de certains passages des œuvres, dont il modifie l'orchestration, dans la ligne de Mahler ou de Mengelberg. Il n'hésite pas à doubler certains pupitres d'instruments à vent ou à pratiquer des coupures. En ce sens, Ormandy est loin des interprétations scrupuleuses d'un Toscanini.

La carrière d'Eugene Ormandy est étroitement associée à celle de son orchestre, formation qui a toujours su retenir ses chefs puisque, avant lui, Stokowski était resté vingt-six ans à Philadelphie. Le rythme de travail des orchestres américains laissait alors peu de liberté pour se produire ailleurs. Aussi Ormandy était-il beaucoup moins connu en Europe qu'aux États-Unis, et il doit sa réputation internationale à une discographie pléthorique : environ 200 enregistrements réalisés pour R.C.A. jusqu'en 1943 et après 1968, et pour C.B.S. (aujourd'hui Sony) entre ces deux dates. En 1980 et 1981, il a enregistré quelques disques pour Telarc et Delos. Avec l'Orchestre de Philadelphie, il a gravé plus de 1 200 œuvres. Pendant la durée de son contrat à Philadelphie, Ormandy ne disposait chaque année que de quatre semaines de liberté ; il en profitait généralement pour aller diriger sur d'autres continents : une tournée en Australie en 1944, quelques apparitions en France – à Prades avec Pablo Casals (1953) puis à Paris avec l'Orchestre national de l'O.R.T.F. (entre 1965 et 1972) –, au festival de Lucerne en 1955, au festival de Salzbourg et à Vienne avec l'Orchestre philharmonique de Vienne (entre 1956 et 1969), au festival de Montreux avec le Concertgebouw d'Amsterdam (1959), en Grande-Bretagne avec le Philharmonia Orchestra (1963) et l'Orchestre symphonique de Londres (avec lequel il réalise notamment un enregistrement de la Neuvième Symphonie « Du Nouveau Monde » de Dvořák en 1966, l'une des rares exceptions à une discographie presque exclusivement accomplie à Minneapolis et à Philadelphie).

Peu attiré par l'opéra, Ormandy fait ses débuts lyriques au Metropolitan Opera de New York, en 1950, dans La Chauve-Souris de Johann Strauss. Mais c'est, avant tout, le concert qui l'attire. Le 20 mars 1948, il dirige le premier concert retransmis à la télévision aux États-Unis, coiffant sur le fil Toscanini... d'une heure et demie ! En 1952, il reçoit la Légion d'honneur pour son action en faveur de la musique française. Il se verra également décerner, entre autres distinctions, la médaille Sibelius. Docteur honoris causa de nombreuses universités américaines, il enseigne la direction d'orchestre au Curtis Institute de Philadelphie de 1968 à 1977. En 1976, il est fait Knight Commander dans l'ordre du British Empire.

Son répertoire touchait à tous les genres du domaine symphonique, mais il a donné le meilleur de lui-même dans la musique postérieure à Brahms. Relativement prudent[...]

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Média

Eugene Ormandy - crédits : Erich Auerbach/ Getty Images

Eugene Ormandy

Autres références

  • PHILADELPHIE ORCHESTRE DE

    • Écrit par
    • 795 mots
    • 2 médias

    Fondé en 1900, l'Orchestre de Philadelphie (The Philadelphia Orchestra) est, avec celui de Cleveland, le benjamin des grands orchestres américains. Ses deux premiers chefs permanents sont allemands : Fritz Scheel (1900-1907) et Carl Pohlig, un ancien assistant de Gustav Mahler (1907-1912). Fritz...