EURO
La théorie des zones monétaires optimales
L’exercice de comparaison des avantages et inconvénients de l'union monétaire est une application de la théorie dite des zones monétaires optimales, dont Robert Mundell, Prix Nobel d'économie en 1999, fut l'initiateur en 1961.
De nationalité canadienne, Robert Mundell réfléchissait à la manière, pour la Banque nationale du Canada, de réagir à un événement affectant positivement la demande dans la moitié ouest du pays, négativement celle de la moitié est. On peut penser, par exemple, à l'apparition d'un nouveau produit fabriqué à l'ouest qui évincerait la demande pour un produit plus ancien fabriqué à l'est. En l'absence d'un ajustement immédiat par migration des travailleurs concernés de l'est vers l'ouest ou par une baisse de leurs salaires, une politique monétaire expansionniste (baisse du taux d’intérêt, par exemple) serait nécessaire pour limiter le chômage à l'est ; mais une telle politique exacerberait les tensions inflationnistes à l'ouest. À l'inverse, une politique restrictive limiterait les tensions inflationnistes à l'ouest, mais accentuerait le chômage à l'est. L'existence d'une monnaie canadienne indépendante n'est donc d'aucun secours dans un cas pareil. Mundell poursuit en imaginant que les États-Unis connaissent un problème similaire, la demande augmentant à l'ouest du pays au détriment de l'est. Si le dollar canadien et le dollar des États-Unis étaient remplacés par un dollar de l'ouest et un dollar de l'est, il suffirait de pratiquer une politique expansionniste à l'est et restrictive à l'ouest, en laissant le dollar de l'est se déprécier par rapport à celui de l'ouest. Mundell conclut que, si elles pouvaient s'affranchir des frontières politiques (ce que le Prix Nobel n'envisage pas sérieusement à l'époque), les zones monétaires devraient regrouper des régions aux conjonctures proches, indépendamment de leurs pays d'appartenance. Il précise que cela ne doit pas entraîner un émiettement des zones monétaires (par exemple, deux dollars au Canada et deux autres aux États-Unis), car les coûts liés à l'échange de monnaies deviendraient trop importants par rapport aux gains issus de l'indépendance monétaire. Entre une monnaie unique pour l’ensemble constitué des États-Unis et du Canada, et une multitude de monnaies répondant à des spécialisations locales, on peut trouver un optimum – une zone monétaire optimale.
La crise de la zone euro, à partir de 2009, est-elle la preuve que cette région du monde ne constitue pas une zone monétaire optimale ? Compte tenu de la grande convergence des cycles d’activité dans la zone euro, on peut douter que ce soit la bonne interprétation de la crise, laquelle résulte plutôt d’un excès cumulatif d’endettement de la part, selon les pays, du secteur public et/ou du secteur privé. Néanmoins, la crise a mis en évidence la nécessité de développer des instruments d’ajustement alternatifs aux taux de change.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Agnès BÉNASSY-QUÉRÉ : professeur à l'École d'économie de Paris, université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Médias
Autres références
-
ARRIVÉE DE L'EURO
- Écrit par Marie-France BAUD-BABIC
- 244 mots
- 1 média
Le 1er janvier 2002, dans douze pays de l'Union européenne, 300 millions de consommateurs découvrent les pièces et les billets de la monnaie qui leur servira désormais d'instrument de paiement commun, l'euro. Trois ans après sa naissance juridique et financière, l'euro fiduciaire...
-
CRISE DE LA ZONE EURO
- Écrit par Arnaud BALVAY
- 326 mots
À partir de 2010, la zone euro est confrontée à une crise économique liée à la dette publique des États qui la composent.
À partir de 2007, la crise des subprimes (prêts immobiliers à taux variable) contraint les principaux pays industrialisés, dont la dette publique est très importante depuis...
-
UNION EUROPÉENNE (HISTOIRE DE L')
- Écrit par Laurent WARLOUZET
- 9 509 mots
- 14 médias
...1980, au commerce intérieur, à la concurrence, à la politique régionale (aide en faveur des régions les plus pauvres) et à un nombre croissant de dispositions environnementales ; dans les années 1990, à la libre circulation des personnes ; et, à partir de 1999, à la monnaie avec la création de l’euro. -
ACHAT POUVOIR D'
- Écrit par Stéfan LOLLIVIER
- 5 644 mots
- 2 médias
...au prix des biens qu'ils achètent le plus fréquemment, et jugent alors leurs évolutions de pouvoir d'achat en fonction des hausses de prix de ces biens. Le passage à l'euro constitue un cas d'école venant illustrer ce phénomène. Lors du passage à l'euro en 2002, l'indice des prix à la consommation n'a... -
BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE (BCE)
- Écrit par Olivier MARTY
- 4 591 mots
- 1 média
...finances publiques, de taux de change et de taux d’intérêt de long terme. La troisième phase, couvrant la période de 1999 à 2002, était consacrée à l’instauration de l’euro sur les marchés financiers (1999), puis comme monnaie fiduciaire tangible, disponible pour tous les agents économiques (2002).... -
CHANGE - Les opérations de change
- Écrit par Henri BOURGUINAT et Gunther CAPELLE-BLANCARD
- 7 017 mots
- 2 médias
Traditionnellement, la livre sterling (GBP) était cotée au certain et faisait donc exception par rapport à la plupart des autres grandes monnaies.Elle a été rejointe au 1er janvier 1999 par l'euro (EUR), qui est également coté au certain. Ainsi, par exemple, on cote, respectivement à Paris... - Afficher les 42 références