EURO
La politique économique en union monétaire
La politique monétaire de la zone euro est décidée mensuellement par le Conseil des gouverneurs de la BCE, qui réunit les six membres du directoire et les gouverneurs des banques centrales nationales, soit vingt-quatre membres au total au 1er janvier 2014. Le Conseil des gouverneurs a pour objectif principal la « stabilité des prix » dans la zone euro. En pratique, l’objectif visé est une inflation annuelle « inférieure à 2 %, mais proche de 2 % sur le moyen terme ». Il est souvent reproché à la BCE son objectif quasi unique, contrairement à la Réserve fédérale américaine (la Fed), qui recherche à la fois la stabilité des prix et le plein emploi. En pratique, toutefois, les deux objectifs convergent à partir du moment où les fluctuations de l’activité (et donc aussi du chômage) à court terme sont mues par des chocs de demande (par exemple, les phases successives d’optimisme et de pessimisme des investisseurs) plutôt que par des chocs d’offre (par exemple, les hauts et les bas du prix du pétrole). La difficulté de la politique monétaire dans la zone euro résulte davantage de l’architecture politique de la zone euro que du mandat de la BCE. Rappelons que la zone euro n’est pas un État fédéral avec un budget alimenté par des impôts fédéraux. Contrairement à la Fed, la BCE n’a pas la possibilité de distribuer de la liquidité en rachetant aux banques des titres fédéraux de dette publique. Seuls sont disponibles sur le marché les titres des États membres, dont la solvabilité (capacité à être remboursés) et la liquidité (capacité à être revendus sur un marché) sont variables.
L’absence de budget fédéral affecte également la conduite de la politique budgétaire au niveau des États membres. Lors de la crise de la zone euro, de nombreux États membres ont été conduits à mener des politiques budgétaires restrictives, lesquelles ont accentué la chute de l’activité et la hausse du chômage. Certains d’entre eux, dont la France, n’avaient pas, avant la crise, ramené leurs finances à l’équilibre, de sorte qu’ils ont manqué de marges de manœuvre pendant la crise. D’autres, dont l’Espagne, avaient atteint avant la crise l’équilibre des finances publiques, mais ont subi un choc tellement fort qu’ils ont eux aussi été obligés rapidement de mener des politiques restrictives. De tels comportements procycliques s’observent dans les États fédérés existants, notamment aux États-Unis. Mais ils sont compensés par l’existence d’un budget fédéral et par une forte intégration financière.
Un budget fédéral est stabilisant dans la mesure où il permet à des États qui vont mal de puiser dans des ressources budgétaires alimentées par ceux qui vont bien. L’exemple le plus parlant est l’assurance-chômage fédérale : les chômeurs des États en crise sont indemnisés par les cotisations des États qui vont bien. Le gouvernement fédéral peut aussi décider de dépenses d’investissement public (par exemple, la réfection de routes) afin de soutenir l’activité dans les États en difficulté.
Quant à l’intégration financière, elle permet, dans les États en crise, aux ménages et aux entreprises d’emprunter à des conditions raisonnables pour soutenir leurs niveaux de consommation et d’investissement, ce qui limite la chute de l’activité dans ces États. La diversification des portefeuilles soutient aussi le revenu des ménages dans les États en crise, grâce aux revenus financiers perçus sur leurs avoirs dans d’autres États.
La crise de la zone euro a mis en lumière la fragilité d’une union monétaire dépourvue d’intégration budgétaire et dans laquelle l’intégration financière n’était pas suffisamment profonde pour survivre à un choc de grande ampleur. C’est pourquoi il a été décidé de compléter l’union monétaire avec une union bancaire. Les discussions sur l’intégration[...]
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Écrit par
- Agnès BÉNASSY-QUÉRÉ : professeur à l'École d'économie de Paris, université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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