EUROPE Géographie
Modeste péninsule de l'immense masse continentale eurasiatique, l'Europe n'a pas de limites claires à l'est. Pour les géographes de la Grèce antique et leurs successeurs, elle ne s'étendait pas au-delà du Bosphore et des rives occidentales de la mer Noire et, plus au nord, se perdait dans l'espace flou des steppes et des peuples nomades. Au xviiie siècle, les cartographes en ont reporté les limites aux monts Oural et à la mer Caspienne pour y faire entrer la Russie, devenue puissance européenne par la volonté de Pierre le Grand. L'expansion coloniale russe sur l'Asie centrale et l'Asie septentrionale au xixe siècle n'a pas remis en cause cette délimitation. D'autant moins qu'il a été d'usage, par la suite, de traiter l'immense URSS comme une entité continentale à part entière. L'éclatement de celle-ci en 1991 est venu reposer la question des limites de l'Europe. Doit-on inclure la Russie et l'étirer ainsi de l'océan Atlantique à l'océan Pacifique, de Reykjavik à Vladivostok, comme le font les Nations unies dans le nouveau découpage régional du monde ? ou doit-on l'exclure, compte tenu de l'immensité de sa partie sibérienne ? On a choisi une position respectueuse de l'acception classique (incluant la partie européenne de la Russie) pour les questions générales, mais plus restrictive lorsque les problématiques russes, notamment territoriales, sont très éloignées de celles du reste du continent.
Du point de vue physique, l'Europe est le continent le plus morcelé. Découpé en de nombreuses presqu'îles, troué de mers intérieures, aucun point de son territoire n'est à plus de 1 500 kilomètres d'un rivage marin, même près de ses limites orientales, au cœur de la Russie d'Europe. Une autre forme de ce morcellement apparaît dans la disposition même du relief, étiré en petites chaînes sinueuses et n'offrant jamais une masse de plateaux continus comme dans tous les autres continents. L'Europe est donc un espace naturellement compartimenté et divisé.
On insiste souvent sur la diversité de l'Europe, mosaïque de paysages et de peuples, fragmentée en une quarantaine de pays que l'histoire a souvent opposés, avant d'en rassembler la plupart dans l'Union européenne (UE). Cette diversité n'est pourtant que très relative. Sur aucun autre continent, on ne trouve une telle régularité dans l'occupation humaine, une telle humanisation des territoires, une telle unité de civilisation. La modernisation de l'économie et de la société, imposée par la mondialisation et la domination du modèle américain de développement, s'y déploie sur un tréfonds culturel commun, hérité de la civilisation gréco-romaine, du christianisme et de la philosophie des Lumières, et sur une organisation spatiale profondément marquée par la révolution industrielle. Plus précoce et plus accomplie à l'ouest qu'à l'est du continent, celle-ci a fourni aux puissances européennes les moyens d'un impérialisme colonial à l'échelle de la planète entre le milieu du xixe et le milieu du xxe siècle. Mais leur rivalité a débouché sur deux guerres mondiales, qui ont marqué la fin de la prépondérance de l'Europe et provoqué sa division en deux blocs, politiquement, économiquement et socialement antinomiques : l'un occidental et capitaliste, l'autre oriental et communiste.
Le regain européen est venu de la construction, sur de nouvelles bases politiques, idéologiques et socio-économiques, d'un marché commun à six partenaires (traité de Rome, 1957). L'adhésion de nouveaux États membres et l'élargissement progressif des compétences des institutions communautaires ont ouvert la voie à une certaine unification, concrétisée par la création d'une union à dix puis à quinze.[...]
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Écrit par
- Jacqueline BEAUJEU-GARNIER : professeure à la faculté des lettres et sciences humaines de l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
- Catherine LEFORT : docteure en géographie
- Pierre-Jean THUMERELLE : professeur des Universités, université des sciences et technologies de Lille (Lille-I)
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