THOMAS ÉVANGILE DE
Parmi les textes rangés sous la rubrique d'Évangiles de l'enfance de Jésus, figure un Évangile de Thomas, philosophe israélite, qui rapporte des miracles de Jésus enfant. Ce livre, écrit probablement au iiie siècle, est conservé en deux textes grecs, ainsi qu'en une version syriaque et une version latine, fort divergentes. Les auteurs anciens, tels qu'Hippolyte (Elenchos, V, vii, 20), Origène (In Lucam, I) et Eusèbe (Histoire ecclésiastique, III, xxv, 6), mentionnent un Évangile de Thomas, en usage chez les Naasséniens, que Cyrille de Jérusalem attribue aux manichéens (Catéchèses, iv, 36). Beaucoup hésitaient à identifier ce livre avec celui de Thomas le philosophe israélite. Cette hésitation était justifiée, car, parmi les manuscrits coptes découverts en Égypte, à Nag Hammadi, en 1945, se trouve le véritable Évangile de Thomas. Il porte en exergue : « Voici les paroles cachées que Jésus le Vivant a dites et qu'a transcrites Didyme Jude Thomas. » Le manuscrit est du milieu du ive siècle, mais l'original peut dater du début du iie siècle, sinon de plus haut. Il a été rédigé en grec ou en syriaque, peut-être à Édesse. C'est un Évangile non canonique, mais d'une extrême importance, car il revêt une forme très différente de celle des Évangiles classiques. Il ne s'agit pas là d'un récit de la vie de Jésus, mais d'un recueil de sentences prononcées par lui et transmises par Thomas, le « frère jumeau » du Seigneur, le très illustre apôtre des Parthes et peut-être de l'Inde, si l'on en croit les Actes de Thomas.
Le genre littéraire de ce texte est assez ésotérique, mais rien ne laisse supposer qu'il s'agit d'un livre gnostique. C'est un ouvrage chrétien d'une forme archaïque, qui doit être mis en parallèle avec les Évangiles canoniques. Pour certaines des paroles de Jésus, il donne un texte qui paraît plus ancien que celui des Évangiles canoniques. Pour d'autres, la formule est très différente, mais n'a pas moins de valeur. Enfin, plusieurs sentences portent la marque d'un christianisme tout à fait archaïque, qui n'a pas subi les corrections qu'on trouve dans les canoniques, d'un christianisme mystique et monastique, tel que celui qui se trouve dans d'autres documents syriens. Les papyrus dits d'Oxyrhynchos (no 1, 654 et 655) qui datent du iiie siècle gardent, en langue grecque, trois sections de cet évangile. Ils ont été publiés au début du xxe siècle, mais les éditeurs n'y ont pas reconnu l'écrit dont, pourtant, Hippolyte avait cité un passage (Philosophoumena, v, 7).
L'enseignement au Collège de France de H.-C. Puech (qui a le premier reconnu le parallélisme des papyrus d'Oxyrhynchos avec l'Évangile de Thomas trouvé à Nag Hammadi) a porté essentiellement, de 1956 à 1972, sur cet évangile et les thèmes ésotériques et gnostiques des logia de Jésus qu'il contient. On se référera toujours avec profit à l'édition de A. Guillaumont, H.-C. Puech et al., L'Évangile selon Thomas (Paris, 1959).
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Écrit par
- Jean HADOT : professeur à l'Université libre de Bruxelles
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