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EXCÈS DE POUVOIR

Les médiateurs administratifs

L' ombudsman est le plus ancien des médiateurs administratifs, et c'est aussi celui dont le domaine d'intervention est le plus vaste.

Le modèle est apparu en Suède au début du xixe siècle, et c'est pourquoi, aujourd'hui encore, l'institution est connue sous son nom suédois, qui désigne une personne agissant pour le compte d'autrui. Mais, depuis les années cinquante, l'idée a séduit d'autres pays, et son succès a été tellement rapide que l'on a pu parler d'« ombudsomanie ». Les principales zones d'expansion ont été la Scandinavie, l'Europe occidentale et certains pays du Commonwealth britannique comme le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Pour ne citer que quelques exemples, le « commissaire parlementaire pour l'administration » (Grande-Bretagne, 1967), le « médiateur » (France, 1973) et le « défenseur du peuple » (Espagne, 1981) ont une parenté évidente avec l'ombudsman suédois, bien qu'ils présentent chacun des particularités liées au contexte national.

L'ombudsman est désigné par le Parlement ou (plus rarement) par l'exécutif, ce qui est le cas du médiateur français. Mais, quel que soit son mode de nomination, il est indépendant dans l'exercice de ses fonctions, ce qui signifie, d'une part, qu'il ne peut pas être révoqué en cours de mandat (sauf dans des cas exceptionnels prévus par la loi) et, d'autre part, qu'il n'a pas d'instructions à recevoir, même de la part des autorités qui l'ont désigné.

En règle générale, les administrés ont la faculté de saisir eux-mêmes l'ombudsman. La Grande-Bretagne et la France font toutefois exception à cette règle : le commissaire parlementaire pour l'administration et le médiateur ne peuvent, en principe, traiter que les plaintes qui leur ont été transmises par un membre du Parlement. Mais, qu'elle soit directe ou indirecte, la saisine n'entraîne aucuns frais, et elle n'est pas assujettie à des règles compliquées de procédure ou de délai. Il est donc souvent plus facile de s'adresser à l'ombudsman que de saisir le juge.

Pour instruire les plaintes, l'ombudsman peut consulter des documents administratifs ou s'adresser directement à un fonctionnaire afin d'obtenir des explications. Mais, lorsqu'il s'agit de sanctionner une illégalité, à la différence du juge, il ne peut ni annuler un acte administratif ni même octroyer une indemnité ; il a seulement la faculté d'adresser une recommandation aux autorités et, le cas échéant, d'engager des poursuites contre les fonctionnaires responsables, ce qu'il ne fait d'ailleurs pratiquement jamais (en France tout au moins). Mais, précisément parce que ses pouvoirs sont moins étendus, l'ombudsman est beaucoup plus libre que le juge quant aux solutions qu'il préconise. Il peut ainsi proposer une solution d'équité lorsqu'il estime que l'application stricte de la légalité conduirait à une injustice. Il peut également, dans son rapport annuel, proposer les réformes qui lui semblent de nature à améliorer le fonctionnement de l'administration.

En France, cependant, le médiateur est encore relativement peu connu du public, et son rôle reste secondaire par rapport à celui du juge administratif. En 1990, par exemple, il a été saisi de 23 000 réclamations, alors que le nombre des affaires portées devant les juridictions administratives était presque quatre fois plus important. Cette situation s'explique par l'ancienneté et le prestige de la juridiction administrative, et aussi par le fait que les deux voies de recours ne peuvent pas être utilisées concurremment. En effet, d'une part, le médiateur ne peut pas intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction, d'autre part, sa saisine[...]

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