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EXPÉRIENCE D'OERSTED

Le chimiste et physicien danois Hans Christian Œrsted (1777-1851) publie, le 21 juillet 1820, le compte rendu de ses observations portant sur la déviation d’une aiguille aimantée sous l’action d’un fil électrique parcouru par un courant et placé à proximité. C’est à partir de cette expérience établissant un lien entre magnétisme et électricité que le Français André-Marie Ampère (1775-1836) développe une première théorie de l’électromagnétisme.

Les faits de l’expérience d’Œrsted sont décrits dans le Journal fürChemieundPhysik. Le texte original (écrit en latin) est intitulé « Experimenta circa effectumconflictuselectrici in acummagneticam » (Expériences sur l’effet du conflit électrique sur l’aiguille aimantée). « Les premières expériences […] remontent aux leçons que j’ai faites l’hiver dernier sur l’électricité, le galvanisme et le magnétisme. Leur conséquence principale est que l’aiguille aimantée est déviée de sa position d’équilibre par l’action de l’appareil voltaïque [c’est-à-dire la pile]. » Dans ce bref article, le physicien danois expose la description de sa découverte : une aiguille aimantée, fixée sur un pivot autour duquel elle est libre de se mouvoir, telle une boussole, est déviée lorsqu’on y approche un fil électrique parcouru par un courant. Il faut donc que le circuit soit fermé pour observer le phénomène. « C’est pour avoir laissé le circuit ouvert que de célèbres physiciens n’ont point réussi », précise Œrsted, qui détaille ensuite les différentes manières avec lesquelles il a souhaité examiner les influences de certains paramètres : orientation du fil par rapport à l’aiguille aimantée, polarité du branchement, interposition de divers matériaux entre l’aiguille et le fil, etc.

Pour bref que soit le compte rendu, l’émoi qu’il provoque chez les savants européens n’en est pas moins intense. En un sens, la célébrité de l’expérience d’Œrsted est davantage due aux progrès théoriques considérables qui la suivent immédiatement plutôt qu’à l’expérience elle-même, qui ne nécessite pas de mettre en œuvre un protocole expérimental particulièrement développé. Bien qu’Œrsted ne propose pas d’interprétation théorique dans son compte rendu, pour saisir néanmoins l’importance de cette expérience, il convient de la mettre en regard avec les publications parues dans les semaines qui ont suivi.

À Paris notamment, lecture est faite de la publication d’Œrsted par François Arago (1786-1853) dès le 4 septembre 1820 devant l’Académie des sciences. La traduction d’Arago fait l’objet d’une publication immédiate. Au début du mois d’octobre, Ampère à son tour présente devant l’Académie des sciences les premiers résultats de ses investigations. Son mémoire impressionne par l’écho qu’il donne à la découverte. On y trouve les notions fondatrices d’une électrodynamique nouvelle : « L’action électromotrice se manifeste par deux sortes d’effets que je crois devoir d’abord distinguer par une définition précise. J’appellerai le premier “tension électrique”, le second “courant électrique”. » Viennent ensuite des présentations sur l’utilisation technique susceptible d’être faite du nouveau phénomène. C’est ainsi qu’il propose de nommer « galvanomètre » l’instrument de mesure du courant électrique reposant sur la déviation d’une aiguille aimantée provoquée par le passage d’un courant électrique, permettant ainsi de mesurer l’intensité de celui-ci. À la suite d’expériences complémentaires qu’il a menées, Ampère souligne l’apparition d’un phénomène d’attraction entre deux fils parcourus par des courants électriques. Il y voit là aussi une manière de mesurer l’intensité d’un courant électrique. C’est d’ailleurs sur ce phénomène que sera fondée jusqu’en 2019 la définition de l’ampère, unité de mesure de l’intensité d’un courant électrique dans le système métrique devenu[...]

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Écrit par

  • : professeur de physique au collège Stanislas de Paris, chercheur associé au laboratoire Syrte de l'Obervatoire de Paris

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