EXPOSITIONS UNIVERSELLES
Un hymne au progrès
Gouvernées par un idéal de paix universelle et la conviction que la prospérité partagée doit concourir à maintenir la concorde entre les nations, les expositions sont d’abord de grandes messes du commerce et de l’industrie, où les marchandises sont présentées en amoncellements hétéroclites et les machines en mouvement. Pour les participants, elles sont d’abord des concours où sont distribuées avec largesse médailles et mentions, dont l’indication sur les papiers à en-tête des entreprises et les emballages des produits constitue un argument publicitaire rentable.
On a qualifié les expositions d’« Olympiades du progrès ». Dans leurs palais, leurs pavillons et leurs galeries, vastes nefs qui allient hardiment le verre et le métal comme des symboles de la foi des hommes du xixe siècle dans le progrès, l’innovation est mise en scène avec un faste destiné à éblouir un public encore peu familiarisé avec le monde des techniques et du machinisme. C’est souvent à l’occasion de l’exposition que l’invention, la machine nouvelle ou le perfectionnement du procédé sont dévoilés au public. Pour se limiter à quelques exemples, on peut citer la machine à coudre de Singer récompensée à l’Exposition universelle de Paris, en 1855, le redoutable canon des usines Krupp d’Essen présenté sur le stand de la Prusse à l’exposition de 1867, ou encore l’ascenseur hydraulique de l’ingénieur français Félix Léon Édoux qui fait sensation à cette même exposition universelle. Les nouveautés qui sont présentées viennent chercher là une reconnaissance et un label de modernité.
Mais les fonctions des expositions internationales sont diverses et beaucoup plus complexes. Elles sont aussi des instruments diplomatiques : s’y aiguisent les rapports de force entre puissances rivales, et les pays dont l’état de l’industrie ne permet pas encore d’entrer dans le cercle des nations les plus développées viennent y chercher la reconnaissance de leurs aspirations. Tels sont les cas, par exemple, lors de l’Exposition universelle de 1867, à Paris, de l’Égypte et de la Tunisie qui cherchent à se délivrer de la tutelle ottomane ; leurs présentations architecturales – le fastueux parc égyptien et la réplique du palais du Bardo – dans le Parc des nations mettent en valeur l’ancienneté de leur histoire et les richesses de leur culture. Les expositions reflètent aussi l’état des relations internationales de leur temps et leurs fluctuations au gré de l’actualité ; elles sont, pour le pays organisateur, l’occasion de compter ses alliances. C’est ainsi qu’à la suite de la guerre de Crimée, la Russie boude l’exposition de 1855, tandis que les monarchies européennes, peu enclines à cautionner la commémoration du centenaire de la Révolution de 1789, se tiennent à l’écart de celle de 1889. En revanche, en obtenant la participation de cinquante-huit pays, symbolisée par l’édification du spectaculaire Quai des nations, l’exposition parisienne de 1900 est un bel exemple d’unanimité. Pour certains hommes d’État, comme Napoléon III qui, durant son règne, prit l’initiative de deux expositions universelles à Paris (1855 et 1867), elles représentent l’occasion de faire reconnaître par le concert des nations une dynastie parvenue au pouvoir par des moyens peu légitimes.
Les expositions jouent également un rôle important dans l’urbanisme. Malgré le caractère éphémère de leurs installations, elles font évoluer les villes qui les accueillent et laissent sur elles une empreinte forte, en contribuant à la création d’équipements nouveaux (gares, hôtels, moyens de transport…), de musées (comme le musée d’Ethnographie du Trocadéro, ouvert à la suite de l’exposition de 1878, et l’actuel musée de l’Homme qui lui succède à l’occasion de l’Exposition internationale de 1937) et de monuments. Paris, qui fut[...]
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Écrit par
- Christiane DEMEULENAERE-DOUYÈRE : conservatrice générale honoraire du Patrimoine
Classification
Médias
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