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FAMILLE Évolution contemporaine

Nouveaux foyers et nouvelles relations sociales

La vie sexuelle change avec la vie sociale : de parental, le lien est devenu conjugal. Dans le système parental, le mariage était considéré avant tout comme une institution ajoutant une cellule à un monde social organisé et préexistant ; dans la perspective conjugale, il est d'abord relation interpersonnelle, rencontre d'un homme et d'une femme pour une histoire à faire à deux. Quand l'important n'est plus la lignée ni la maison avec ses traditions à transmettre, c'est simplement l'autre, le partenaire tel qu'il est, qui prend toute la place, avec la perspective ouverte sur l'avenir.

La femme dans la vie du couple

Si ce changement est dû à de profondes transformations économiques et sociales, il en entraîne d'autres à son tour ; la valorisation du conjugal est peut-être aujourd'hui la source principale des changements qui affectent les vieux stéréotypes du monde féminin. Il est, par exemple, tout à fait impossible de garder la traditionnelle ségrégation sexuelle et de confiner la femme dans les tâches ménagères et éducatives. L'ouverture s'effectue dans la mesure même où la famille est réduite à son noyau essentiel : le couple et ses enfants, face à un avenir pour lequel le passé ne fournit plus de modèles valables, et qu'il faut organiser.

Le couple cherche de plus en plus à assurer son autonomie. Dans les structures parentales, appui et sécurité se trouvaient dans les larges cercles concentriques de la parenté ; la famille de type conjugal met au contraire l'accent sur la nécessaire et difficile séparation d'avec les parents ; il ne s'agit certes pas de rompre les liens affectifs, mais d'assurer l'indépendance du couple.

La femme pouvant mener une vie personnelle et le couple devant affirmer son autonomie, la rencontre de l'homme et de la femme, puis l'histoire de leur union vont se trouver fortement individualisées. Dans le système parental, l'expérience matrimoniale était plutôt celle d'un groupe ou d'une classe qu'une expérience individuelle ; en tout cas, les valeurs du mariage étaient objectivables et apparaissaient comme le bien commun de la société. Au contraire, les valeurs d'une rencontre homme-femme dans la dilution du tissu urbain sont de plus en plus le bien fragile d'un couple dans une expérience impossible à communiquer. La perte de la sécurité, que donnaient l'enracinement parental et la stabilité des institutions, ne peut être compensée que par une valorisation et une intensification de l'intimité.

Relativité des modèles

Dans la mesure même où les valeurs poursuivies sont personnelles avant d'être sociales, il n'y a plus un modèle, mais plusieurs : il existe des couples dont la formule paraît valable à la société moderne, mais non un type de couple qu'elle pourrait prendre comme modèle.

Il peut s'opérer d'abord une transposition du modèle ancien de la famille, qui ne doit pas être confondue avec les survivances néfastes. La femme choisit de rester au foyer, femme d'intérieur au service de son mari et de ses enfants, mais dans une famille ouverte où elle peut s'épanouir en des relations multiples. C'est encore la femme au foyer, mais c'est une autre façon d'être au foyer. Avant tout parce que c'est un choix et non plus un destin imposé par une vision du monde définitive. Ensuite parce que le foyer lui-même est ouvert largement à des responsabilités sociales, qu'elles soient communes au couple ou propres à chacun des conjoints.

Il en va tout autrement si la famille ancienne subsiste comme un corps étranger dans la vie moderne. Quand les mentalités restent trop imprégnées du passé pour pouvoir transmuer les rôles, nous trouvons encore la femme au foyer ; mais elle s'ennuie et ne[...]

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Écrit par

  • : docteur en philosophie, professeur à l'institut d'études sociales de l'Institut catholique de Paris
  • : professeur des Universités, faculté des sciences sociales de la Sorbonne, directeur du Cerlis (C.N.R.S.-université de Paris-V)

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