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FAMILLE Le droit de la famille

Méthodes du droit de la famille

La pluralité des sources du droit de la famille, la complexité de son objet, la nécessité de le reformer ont conduit les juristes contemporains à affiner leur méthodologie, à diversifier leurs techniques, et à faire preuve de modestie et de réserve face à une réalité humaine qui souvent échappe à toute rationalisation et qui reste à maints égards un mystère.

On évoquera seulement ici, à défaut de pouvoir en traiter véritablement, quelques problèmes méthodologiques relatifs aux règles de droit et aux décisions judiciaires, qui font pour certains la spécificité, pour d'autres, l'autonomie du droit de la famille au sein du système juridique global.

Nature et caractères des règles de droit

Face à une réalité très diversifiée au sein d'une même société, il paraît illusoire et dangereux d'élaborer un droit rigide et monolithique. Sans renoncer à préserver l'ordre public, le droit contemporain français, soucieux de réalisme empirique et politiquement épris de libéralisme, veut aménager plusieurs modèles et conférer aux règles de droit plus de souplesse qu'une conception rigide ne l'autorisait antérieurement.

Le pluralisme des institutions familiales est patent : diversité des cas de divorce, diversité des filiations, des modes d'exercice de l'autorité parentale, des adoptions, des régimes de protection des incapables, des régimes matrimoniaux, des modes de gestion des indivisions. « À chacun sa famille, à chacun son droit », titre le doyen Carbonnier (1908-2003), qui inspira la quasi-totalité des lois françaises en matière familiale (Essai sur les lois, chap. x, 1re partie). Malgré « la force des déterminismes sociaux et des aspirations idéologiques » (J. Carbonnier, op. cit., 7), les familles restent en fait différenciées, et il est opportun que chacune puisse trouver dans la législation le modèle adéquat. L'adaptation du droit, lorsque l'impératif de la norme l'autorise, est recherchée aussi par nombre de compromis entre des aspirations et des intérêts opposés, par la consécration juridique des situations de fait, et, de façon plus nouvelle, par la souplesse des règles susceptibles d'être infléchies, aménagées, par l'action des volontés individuelles ou le relais de décisions judiciaires, voire même écartées si leur application stricte est source de trop graves iniquités, compte tenu des circonstances.

Il en résulte une assez grande complexité des lois, une relative indétermination de leurs concepts dominants tels que l'« intérêt de l'enfant » ou l'« intérêt de la famille », et, par conséquent, un rôle déterminant reconnu aux juges dans l'appréciation des faits et l'interprétation des textes.

Le rôle des juges

L'importance du pouvoir judiciaire dans sa fonction traditionnelle d'arbitre des conflits et dans sa fonction nouvelle de « tuteur » des intérêts familiaux s'est notablement accrue. Le contentieux familial, notamment celui du divorce et de l'autorité parentale, est en croissance par suite de causes complexes peu favorables à la permanence de l'institution familiale, et c'est au juge qu'on en appelle pour vider les conflits avérés ou non mais réels que connaît la famille. En outre, le législateur a multiplié les motifs d'intervention judiciaire même en l'absence de conflit, afin de maintenir un contrôle social des décisions que nécessitent l'état des personnes ou la vie des familles ; assistance éducative, tutelles, adoption, régimes matrimoniaux, partages successoraux, toutes ces matières sont désormais régies autant par des règles que par décisions judiciaires. Dans ce double rôle, le juge reçoit la mission d'assurer la protection de l'intérêt de la famille ou de l'enfant, et de prendre des décisions où les considérations d'opportunité,[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, agrégée de droit privé
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