FAMOUS (French American Mid Ocean Underwater Survey)
Le sigle F.A.M.O.U.S. désigne la première exploration scientifique d'une dorsale océanique à partir de submersibles profonds, expédition réalisée en collaboration entre la France et les États-Unis en 1973 et 1974. F.A.M.O.U.S. constitue la première étude directe selon des techniques issues de la géologie de terrain de la vallée centrale de la dorsale médio-atlantique et de son intersection avec une faille transformante dans une zone située à 700 kilomètres au sud-ouest des Açores, par des profondeurs variant entre 2 500 et 2 800 mètres.
Trois submersibles ont été utilisés pour l'étude détaillée de cette zone représentant quelques centaines de kilomètres carrés de surface : du côté américain, l'Alvin porté par un grand catamaran spécialisé, le Lulu ; du côté français, l'Archimède remorqué par le Marcel Le Bihan et la soucoupe 3000 Cyana portée par le Noroît. La première plongée de la campagne 1973 a eu lieu le 2 août avec le bathyscapheArchimède, et c'est aussi l'Archimède qui effectua dans les premiers jours de septembre 1974 la cinquante et unième et dernière plongée de l'expédition F.A.M.O.U.S. (dont 19 pour Archimède, 15 pour Cyana et 17 pour Alvin). Quatre-vingt-onze kilomètres ont été parcourus au fond, à une altitude inférieure à cinq mètres, dans un relief extraordinairement tourmenté. Deux tonnes de roches ont été prélevées en 167 sites différents dans un environnement géologique bien défini. Plus de 100 heures de télévision sur bande magnétique ont été enregistrées au cours des 228 heures passées sur le fond, et 23 000 photographies ont été prises.
Le premier apport positif de F.A.M.O.U.S. est certainement la mise au point d'un outil d'exploration géologique du fond des océans, permettant l'établissement d'une carte topographique précise à quelques mètres près, précision jamais atteinte à partir des opérations conduites depuis la surface.
Au plan proprement scientifique, F.A.M.O.U.S. a permis la première vérification directe du mouvement le long des frontières de plaques, comme le prédisait la théorie de la tectonique des plaques. Un deuxième résultat est la délimitation de la largeur des zones frontières des plaques. Cette largeur est particulièrement faible, puisqu'elle ne dépasse pas un kilomètre. En dépit de cette largeur restreinte, les zones frontières se sont révélées très complexes, et l'interprétation est rendue plus difficile par une évolution très rapide de leur géométrie au cours du temps.
Un troisième résultat concerne la découverte de gisements hydrothermaux en grande profondeur, sous la forme d'un champ de petite dimension (15 × 40 m) situé autour d'une fissure émissive d'une cinquantaine de centimètres de largeur, et longue de plusieurs mètres. Les dépôts hydrothermaux sont constitués de fer près de la bouche émissive, et de manganèse plus bas.
Les résultats scientifiques de l'opération F.A.M.O.U.S. ont eu de nombreuses retombées : tout d'abord ans le domaine scientifique, pour l'étude de l'hydrothermalisme sous-marin dans une région plus active, la dorsale du Pacifique oriental ; ensuite, en matière de collaboration franco-américaine ; enfin, dans le domaine industriel, les techniques de navigation précise mises au point durant l'opération s'appliquant facilement à des travaux de reconnaissance de trajets de conduites sous-marines par exemple.
Pour toutes ces raisons l'exploration F.A.M.O.U.S reste une grande page historique où le visuel conforte la théorie. Exploration que certains n'ont pas hésité à comparer avec l'écart qu'il peut y avoir d'observer la Lune et d'y poser effectivement le pied.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Lucien LAUBIER : professeur émérite à l'université de la Méditerranée, Marseille
Classification
Média