‘AṬṬĀR FARĪD AL-DĪN MUḤAMMAD B. IBRAHĪM dit (1119 env.-env. 1190)
Poésie et mystique
Le Langage des oiseaux est un poème déjà bien connu. Son titre est coranique (XXVII, 16, cf. 20). Avicenne avait composé un récit initiatique sur ce thème de l'oiseau, symbole de l'âme, pris aux filets du monde, retournant par degrés vers son roi. Ahmad Ghazāli écrivit à son tour, en persan, un récit sur le pèlerinage des oiseaux vers leur roi ; il insistait sur les épreuves du chemin, mais son récit manquait la passe de l' initiation : l'accueil du roi n'était qu'une grâce accordée aux oiseaux terrifiés. ‘Aṭṭār reprit ces descriptions, accentua le caractère initiatique du récit avicénien. On sait l'histoire : les oiseaux se rassemblent pour choisir un roi ; la huppe, expérimentée dans les voies spirituelles, leur désigne Simorgh, l'oiseau « proche de nous et dont nous sommes éloignés ». Elle les entraîne à franchir sept vallées : Recherche, Amour, Connaissance, Indifférence, Unification, Stupeur, Anéantissement. Finalement, les trente (sī) oiseaux (morgh) qui ont su franchir les vallées et dépasser le choc du Numineux se découvrent eux-mêmes Sīmorgh : au terme du cheminement, c'est « le mystère de son propre soi-même » (H. Corbin) qui est révélé à l'individu anéanti.
Le Livre divin, autre long poème, a pour thème central le renoncement. Un roi invite ses fils à exprimer ce qu'ils souhaitent ; ce sont des désirs tout mondains ; le roi leur enseigne à les transmuer en désirs des biens qui ne passent pas. Le récit s'achève sur l'éloge de la résignation et du silence de l'âme dépouillée et confiante. Le Livre de l'adversité, poème de près de 7 000 distiques, est le récit du voyage de l'âme autour de sa clôture. Elle questionne les entités mystiques, cosmiques et naturelles. Dans la douleur de la recherche, elle en vient à reconnaître que l'homme en sa corporéité n'est pas l'homme proprement dit : celui-ci est « secret divin et âme pure » ; ainsi, chercher Dieu, c'est chercher son vrai soi en questionnant le monde. Ici, Dieu n'est plus même signifié symboliquement.
Le Livre des secrets, moins étendu et sans construction apparente, traite en douze sections de notions classiques dans le soufisme. Le Divan est un grand recueil de poèmes dont l'enseignement reste à inventorier ; un nombre important de ces poèmes sont de courtes pièces où l'expression symbolico-mystique est riche et capable d'enthousiasmer. Les disciples de Rūmī ont commenté plusieurs de ces poèmes. La sortie du monde par immersion dans l'âme en constitue un thème important. Un recueil de Choix semble devoir être attribué encore à ‘Aṭṭār. On y trouve groupés en cinquante chapitres des quatrains consacrés au thème de l'amour ; plusieurs de ces beaux quatrains ont été par la suite attribués à ‘Omar Khayyām.
Les autres œuvres signées de ‘Aṭṭār sont d'au moins deux homonymes du grand mystique ; ils vécurent l'un au xiiie siècle et l'autre au xve siècle.
La mort est l'un des pôles de la pensée de ‘Aṭṭār. À ses yeux, elle consacre le caractère éphémère de la vie terrestre. L'homme dans le besoin et la douleur n'a d'autre source de connaissance que son âme ; il y découvre que seule la vie de l'au-delà a une valeur. Dans le renoncement au monde, il troque le mal contre le bien, il triomphe de la peine par la pauvreté, la patience. L'autre pôle de la pensée de ‘Aṭṭār est que, hors de Dieu, rien n'existe vraiment ; il faut donc chercher la proximité de ce Dieu intérieur à l'âme, dont il est le vrai soi. ‘Aṭṭār est un homme qui chercha dans un dramatique voyage intérieur à coïncider avec un soi-même senti comme divin.
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Écrit par
- Charles-Henri de FOUCHÉCOUR : professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales
Classification
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AVICENNE, arabe IBN SĪNĀ (980-1037)
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...il y en aura plus d'une imitation, l'ensemble formant un cycle qui trouvera son couronnement dans l'admirable épopée mystique persane de Farīdoddīn ‘Attār (xiie s.). Le Récit de Salamān et Absāl, c'est le drame des deux héros de la partie finale du Livre des directives et des remarques... -
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