FAUVISME
Le mot « fauvisme » dérive d'une boutade du critique Louis Vauxcelles, prononcée à l'occasion du Salon d'automne de 1905. Au milieu de la salle où étaient rassemblées les œuvres de Matisse et de ses amis, trônait une statuette d' Albert Marque dans le style de la Renaissance italienne ; Vauxcelles s'écria : « Donatello chez les fauves ! »
Le qualificatif « fauve », qui convenait bien à l'art violent de ce groupe de peintres, est resté. Le mot « fauvisme » devait apparaître un peu plus tard, pour désigner à la fois le groupe et son art. Consacré par l'usage, ce terme n'en garde pas moins une extension incertaine sur trois points.
Le fauvisme a été la réunion d'artistes ayant mêmes admirations, mêmes goûts, et que les attaques de la critique vont encore rapprocher. Ce n'est ni une association organisée comme la Brücke, ni même un groupe solidement lié par l'amitié et par un credo artistique assez précis, comme celui des nabis. Il n'y a pas de liste type des fauves, et nul n'a jamais songé à retenir celle des exposants de la cage aux fauves du Salon d'automne. En plus des membres incontestés du groupe, qui ne sont guère qu'une dizaine, et parmi lesquels Van Dongen et surtout Rouault occupent une place un peu à part, il faut ajouter ceux que des amitiés personnelles ou le hasard des circonstances en ont rapprochés un instant, et surtout ceux que les classements traditionnels rangent, en raison de leurs œuvres postérieures, dans d'autres groupes, comme Braque, Metzinger, R. et S. Delaunay. En revanche, ce n'est que par une extension discutable qu'on y inclut des artistes dont les recherches offrent des parentés certaines avec le fauvisme, mais qui ne se sont pas moins tenus à l'écart du groupe.
Les dates posent aussi un problème. S'il est difficile de fixer un début au fauvisme, les premières œuvres déjà fauves de Matisse se plaçant vers 1896, la fin du mouvement paraît assez nette ; sauf Van Dongen, tous les fauves se sont orientés à partir de 1908 vers un art très différent de ce qu'ils faisaient vers 1905. Qu'ils soient restés marqués toute leur vie par cette aventure est certain ; mais le qualificatif de fauve appliqué au Derain ou au Matisse de 1925 ou de 1940 n'a plus de sens.
Van Dongen excepté, le fauvisme, phénomène parisien, n'a réuni que des Français de souche, à la différence de la plupart des autres mouvements de l'art moderne. Les mots « fauve » et « fauvisme », sous leur forme française ou adaptée (fauvismus, fauvismo, etc.) sont passés dans les principales langues occidentales avec la même acception qu'en français. Mais depuis quelques décennies, des historiens d'art allemands emploient le mot « fauve » pour désigner la période la plus « chaude » de la Brücke. Établir une comparaison et l'existence de contacts est utile. Mais l'expressionnisme allemand constitue en lui-même un phénomène suffisamment important et caractérisé pour qu'on ne crée pas à son sujet de confusion de vocabulaire avec le fauvisme français.
Historique
Quand les fauves se manifestèrent comme tels en 1905, ce fut pour la critique, et surtout pour le public, une découverte ; en fait, la plupart d'entre eux travaillaient depuis quelques années déjà dans un esprit révolutionnaire et exposaient ici et là, notamment à la galerie Berthe Weil.
C'est autour de Matisse, que son âge et son autorité intellectuelle prédisposaient à jouer ce rôle, que s'est constitué le mouvement. La principale pépinière des fauves fut l'atelier de Gustave Moreau à l'École des beaux-arts, où Rouault, Matisse, Marquet, Camoin, Manguin, Puy et quelques autres devaient nouer des relations durables. En 1898, Derain rencontre Matisse et Puy dans une petite académie libre où Carrière[...]
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Écrit par
- Michel HOOG : conservateur du musée de l'Orangerie, chargé du palais de Tōkyō
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Média
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