VALLOTTON FÉLIX (1865-1925)
La quête d’un style
En 1899, Félix Vallotton rompt avec la compagne de sa jeunesse pour épouser une veuve avec trois enfants, Gabrielle Rodrigues-Henriques, la fille du grand marchand parisien de tableaux, Alexandre Bernheim. Ce tournant dans sa vie infléchit le cours de son activité, qui sera désormais focalisée sur la peinture. En quête de renouveau et tandis que sa palette s’éclaircit, il s’écarte peu à peu de la représentation en plan, privilégiée par les nabis, pour s’orienter vers une spatialité plus proche de la vérité. Elle s’affirme dans des paysages inspirés de ses lieux de villégiature (Bretagne, Normandie) et dans des intérieurs où se lit son admiration pour les maîtres du xviie siècle hollandais ( Intérieur avec femme en rouge de dos, 1903). Il reste cependant en quête d’une formule qui ne soit qu’à lui, tout à la fois moderne et rattachée à la tradition. Ce projet prend forme à la fin de 1904 lorsqu’il modèle quelques statuettes de femmes nues. Elles ouvrent la voie à près de quatre années vouées à la figure et au nu (Le Repos des modèles, 1905), y compris dans de grandes toiles à sujet mythologique (L’Enlèvement d’Europe, 1908) ou allégorique (La Haine, 1908). Au terme de cette révision, Vallotton se sait en possession du style personnel auquel il aspirait et qu’il s’appliquera le restant de sa vie à parfaire. Sous l’égide d’Ingres, son maître par excellence, il vise la synthèse, privilégiant la ligne et la forme serrée dans son contour.
En 1909, il se remet à peindre des paysages, qu’il recompose dans l’atelier d’après des notes tracées sur le motif. En alternance avec des nus, des figures et des natures mortes, il multiplie les paysages au gré de ses villégiatures en Normandie, de ses campagnes aux quatre coins de la France, de ses voyages en Italie, en Suisse et en Russie (1913), puis des hivers qu’il passe à Cagnes-sur-Mer à partir de 1920.
Lorsqu’éclate la Première Guerre mondiale, il demande à être engagé volontaire ; il est refusé en raison de son âge. Il en est affecté, mais la guerre deviendra pour lui une nouvelle source d’inspiration : il réalise 1914, paysage de ruines et d’incendies, un grand triptyque allégorique et une série de six xylographies réunies dans le portefeuille nommé C’est la guerre ! Suivront une dizaine de paysages avec ruines d’après des croquis réalisés sur le front dans le cadre des missions d’artistes aux armées et enfin des « tableaux de guerre interprétés » (Verdun, 1917). Après l’armistice, le succès lui sourit à nouveau ; il n’en profitera pas longtemps : atteint d’un cancer, il meurt à Paris des suites d’une opération au lendemain de ses soixante ans, en 1925.
À Paris, il a exposé au Salon des indépendants jusqu’en 1908 et au Salon d’automne, dont il était un membre fondateur, de 1903 à sa mort. En Suisse, le Künstlerhaus de Zurich lui a consacré une exposition personnelle en 1909 et il a participé, entre autres, à l’exposition nationale de 1914 à Berne. Le Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne, les musées d’Art et d’Histoire de Genève, le Kunsthaus de Zurich et le musée d’Orsay à Paris possèdent les collections les plus riches en œuvres de Vallotton.
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Écrit par
- Marina DUCREY : conservatrice honoraire de la fondation Félix Vallotton, Lausanne
Classification
Médias
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