FÉMINISME Les théories
Le différencialisme
Un autre courant, issu de sa confrontation avec la psychanalyse, adopte quant à lui une position différente et affirme – non sans référence à Mélanie Klein – qu'il existe deux sexes, deux modalités différentes d'incarnation de l'humanité, générant deux manières d'être au monde dont l'une a été bridée et asservie à l'autre. Si le rapport au monde masculin de type phallique a dominé l'histoire – parce qu'il inclut la modalité relationnelle de la domination – le rapport au monde féminin, jusqu'ici occulté – et lié à la modalité maternelle de l'accueil – offre une alternative bénéfique.
Soutenu initialement par l'œuvre de Luce Irigaray, ce courant conteste l'affirmation lacanienne d'un signifiant commun aux deux sexes, et corrélativement la référence de l'humanité aux insignes phalliques. Au trait unaire qui caractérise ce signifiant, Irigaray oppose le signifiant féminin de « l'incontournable volume » ou des « lèvres qui se touchent », c'est-à-dire du non-un. Ainsi est reprise et traduite positivement la formule lacanienne selon laquelle la femme est « pas toute ».
Marginalisée dans l'espace français dont la tradition politique est dominée par la conception de « l'individu » neutre, cette interprétation a parfois été qualifiée péjorativement d'« essentialiste » parce qu'elle semble figer chacun des deux sexes dans une essence immuable. Mais elle a inspiré d'importants courants du mouvement des femmes, en particulier en Italie ou aux États-Unis où elle a même parfois été qualifiée à tort de french feminism. On peut y rattacher indirectement la pensée américaine du care (Caroll Gilligan) qui affirme la nécessité d'un surplus de souci de l'autre ou de la sollicitude sur la justice. Dans cet éclairage, l'émancipation des femmes modifierait la conception même du monde commun.
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Écrit par
- Françoise COLLIN : docteur en philosophie, professeur honoraire, Bruxelles et Paris
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