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FÉODALITÉ

Les coutumes féodales

Elles se formèrent d'abord, semble-t-il, dans la région qui avait subi le plus fortement l'empreinte carolingienne, c'est-à-dire dans la moitié septentrionale de la France, entre 980 et 1075. Elles s'introduisirent rapidement en Angleterre où, par un processus semblable, la dislocation du pouvoir royal et la constitution de la seigneurie avaient fait de rapides progrès pendant le xe siècle. Elles pénétrèrent beaucoup plus lentement en Allemagne, qui demeura longtemps fidèle aux structures politiques carolingiennes et où l'autorité monarchique ne déclina pas aussi vite : la féodalisation des pays germaniques date du xiie siècle. Le sud de la Gaule – d'où semblent issus beaucoup de termes du vocabulaire féodal –, l'Italie et l'Espagne ne reçurent de la féodalité que des formes imparfaites.

Le lien féodal et ses obligations

C'est par la cérémonie de l' hommage que se nouaient les liens de la vassalité. Nu-tête, sans arme, en posture de complète humilité, le vassal venait s'agenouiller devant celui dont il avait choisi de devenir l'homme et plaçait entre les mains de celui-ci ses deux mains jointes, en signe de total abandon. Le seigneur le relevait aussitôt et le baisait sur les lèvres, geste qui exprimait le caractère honorable de l'engagement et rétablissait entre les contractants des rapports d'égalité. Puis le vassal, la main touchant un objet sacré et prenant Dieu à témoin, prêtait serment de fidélité, engageant sa propre foi et manifestant qu'il n'avait rien aliéné de sa liberté. C'est alors que le seigneur, lui plaçant dans la main un objet symbolique, l'investissait de son fief. Tous les hommages n'étaient pas suivis de l'investiture : il y eut en effet longtemps des vassaux non fieffés que leur seigneur entretenait dans sa maison et dont il ravivait l'amitié par des cadeaux périodiques. Mais peu à peu, et dès le xie siècle en France, il devint exceptionnel que le vassal ne fût pas, sinon pour l'ensemble de ses biens, du moins pour une part d'entre eux, le feudataire de son seigneur.

L'attache ainsi nouée liait les deux hommes pour la vie. Pour saisir la portée de cette relation, référons-nous à l'analyse qu'en donne l'évêque Fulbert de Chartres au début du xie siècle : « L'obligation fondamentale du vassal est de ne rien faire qui puisse causer dommage au seigneur dans son corps, dans ses biens, dans son honneur. » Le lien vassalique a donc pour fonction primordiale d'établir entre les deux contractants une garantie de sécurité. Mais le devoir de ne pas nuire s'accompagne d'exigences positives qui s'expriment par deux mots, l' aide et le conseil. Aider, c'est venir à la rescousse, prêter main-forte dans les difficultés, et, dans ce milieu de guerriers, spécialement par les armes. Quant à l'obligation de conseil, elle astreint à se rendre auprès du seigneur lorsque celui-ci convoque sa cour, sans l'avis de laquelle il ne peut prendre aucune décision importante. Ce devoir est l'occasion, par des rencontres périodiques, de faire renaître le climat de camaraderie des primitives clientèles domestiques. Il faut mettre en évidence que de telles obligations sont réciproques : « en toutes choses, le seigneur doit rendre la pareille à son vassal ». Mais Fulbert précise bien que les devoirs du vassal sont plus astreignants ; à propos d'eux seulement, il emploie le terme très fort de «   service » ; il indique enfin expressément que le vassal y est astreint « pour mériter son fief ». En bref, le seigneur (le mot vient du latin senior qui signifie le plus vieux) attend de son homme un dévouement de caractère familial, assez semblable à celui qu'un père peut attendre de son fils. L'hommage crée en réalité, entre[...]

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