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TÖNNIES FERDINAND (1855-1936)

Sociologue allemand, à la mémoire duquel reste attachée la célèbre distinction entre communauté (Gemeinschaft) et société (Gesellschaft). Après avoir étudié à l'université de Strasbourg et obtenu le doctorat de philologie à Tübingen (1877), Ferdinand Tönnies s'orienta vers la philosophie politique et la philosophie sociale (Londres, Berlin, Kiel). Il devint président de la société allemande de sociologie (Deutsche Gesellschaft für Soziologie, 1909) avec Werner Sombart et Max Weber. En 1933, son opposition au national-socialisme lui valut d'être déchu de la dignité de professeur émérite (emeritus). Il fut l'élève du logicien Kuno Fischer, d'Adolphe Schmidt, pour l'histoire de la philosophie, et surtout de Friedrich Paulsen, qui lui fit connaître Hobbes (Hobbes Leben und Lehre, 1896), Spinoza et Marx. C'est tardivement, seulement en 1912, avec la troisième édition de son ouvrage Communauté et société (Gemeinschaft und Gesellschaft, 1887), que l'importance de Tönnies comme sociologue fut reconnue.

Les concepts de communauté et de société reposent, pour lui, sur un fondement psychologique, sur la reconnaissance de deux formes de la volonté humaine : la volonté organique et la volonté réfléchie ou rationnelle, la première, dépendant de la vie végétative, se manifeste par le plaisir, l'habitude et la mémoire ; la seconde, pur « produit de la pensée » (Gedankenprodukt) dirigée vers l'extériorisation de l'être, se manifeste par la réflexion et la décision. La communauté naît à partir de la famille (l'économie communautaire est une économie domestique dont l'unité est la maison rurale) ; c'est un milieu dans lequel la morale s'exprime spontanément par les liens profonds du sang, de l'amitié et de la foi, intensément vécus et ressentis. Dans la société, au contraire, biens et individus sont « organiquement séparés » ; l'échange est le seul contenu de la vie sociale, manifesté par le contrat, qui est une relation de type externe et conventionnel. Tandis que, à partir des mêmes concepts, Durkheim (voir De la division du travail social) aboutit à des conclusions diamétralement opposées, il est clair, pour Tönnies, que la morale est appelée à se dissoudre dans la société : « La grande ville et la société en général représentent la corruption et la mort du peuple. »

Les concepts de Gemeinschaft et de Gesellschaft sont cependant étudiés par Tönnies comme des types idéaux et non comme des catégories classificatoires. Les relations qu'ils peuvent recouvrir sont soit des relations de subordination (Henschaft) soit des relations égalitaires (Genossenschaft). Quant aux normes — la coutume (Die Sitte, 1909), aussi bien que l'opinion publique (Kritik der öffentlichen Meinung, 1922) —, elles contiennent des éléments communautaires et « sociétaux ».

La réflexion de Ferdinand Tönnies devait aboutir à une analyse historique globale de l'évolution de la société contemporaine. Il n'en a livré que des fragments (Geist der Neuzeit, 1935 ; Fortschritt und soziale Entwicklung, 1926).

— François VIEILLESCAZES

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Écrit par

  • : ancien élève de l'Institut d'études politiques de Paris, diplômé de chinois, sociologue

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