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CAMON FERDINANDO (1935- )

L'écrivain italien Ferdinando Camon est né à Montagnana, dans la campagne vénitienne aux alentours de Padoue. Après la publication de quatre recueils d'entretiens et de critiques sur des auteurs contemporains, il édite un recueil de poèmes préfacé par Pasolini. Mais le roman qui va l'imposer au grand public est Il Quinto Stato, 1970 (Figure humaine), dans lequel il décrit l'expérience d'un jeune fils de paysans aux prises avec le monde archaïque de la campagne de la vallée du Pô. L'histoire des familles qui composent ici l'assemblage humain est perçue comme une fatalité inscrite dans un espace et dans un temps qui sont ceux où l'homme se voit réduit à une sauvagerie ancestrale. Le jour où une jeune fille de la ville arrive parmi ces gens éclate une sorte de révélation-révolution dans l'esprit du jeune garçon qui saisit l'importance de ce que la jeune fille apporte avec elle et lui fait lentement découvrir : la culture, le savoir, qui vont lui permettre d'échapper à l'histoire immuable de son milieu d'origine. Mais l'intérêt du livre tient aussi à un style narratif qui se déploie comme un long ruban de mémoires convulsives où les impressions de chaque individu deviennent le lot d'une histoire commune ; c'est la première tentative de « flux de conscience » appliquée au monde rural, avec un résultat étonnant. Ce premier livre fait partie d'une trilogie épique, Le Cycle des derniers, dont les autres titres sont La Vita eterna, 1972 (La Vie éternelle) et Un altare per la madre, 1978 (Apothéose), dans lequel Camon exalte les valeurs terrestres présentes dans la vie de sa mère, nourrie de nécessités et de silences, et en mémoire de qui le père va édifier et faire consacrer un autel. Les divers moments émotionnels de ce récit s'achèvent avec la description de cette édification, qui matérialise le souvenir de la mère. Camon s'est aussi beaucoup intéressé à l'histoire civile de l'Italie, et plus particulièrement aux mouvements révolutionnaires et terroristes issus de 1968 dans la ville de Padoue ; une grande fresque romanesque de cette épopée nous est proposée dans Occidente, 1975 (Occident). D'autres œuvres sont fortement marquées par l'expérience psychanalytique : dans La Malattia chiamata uomo, 1981 (La Maladie humaine) et dans La Donna dei fili, 1986 (La Femme aux liens), un homme et une femme livrent avec un humour souvent poignant leurs incertitudes face au monde qui les délimite. Une même force récitative, une même parole qui réfléchit en se confessant unissent étroitement ces derniers récits aux premiers. À preuve les livres qui leur font suite, Mai visti sole e luna (1994) et Dal Silenzio delle campagne (1998). En retraçant l'histoire d'une communauté paysanne, depuis l'occupation allemande jusqu'à aujourd'hui, Camon renoue avec l'évocation d'une civilisation dont les usages et la culture se perdent désormais dans l'oubli.

— Jean-Paul MANGANARO

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