BUJONES FERNANDO (1955-2005)
Danseur étoile américain.
Considéré comme l'un des plus grands danseurs du xxe siècle, Fernando Bujones a été le premier danseur américain à se hisser au rang d'étoile internationale. « Barychnikov a la publicité, mais moi j'ai le talent », avait-il crânement affirmé, alors que l'étoile soviétique venait de faire défection pour l'Ouest et que lui-même venait de se voir attribuer la médaille d'or au fameux concours de Varna (Bulgarie) le 24 juillet 1974. Bujones était non seulement le premier Américain médaillé dans cette compétition reconnue pour décider des meilleurs danseurs du monde, mais il avait aussi réussi l'exploit de se faire couronner dans la catégorie senior alors qu'il n'était que junior, puisqu'il n'avait que dix-neuf ans. Ces deux stars mondiales de la danse rivalisèrent à l'American Ballet Theatre (A.B.T.) où Fernando Bujones avait été engagé en 1972 deux ans avant Mikhaïl Barychnikov. Quand ce dernier devint directeur artistique de l'A.B.T. en 1980, la concurrence entre les deux hommes s'accrut au point de se terminer, en 1985, par le renvoi de Bujones. Celui-ci devait pourtant y revenir après le départ de Barychnikov, en 1989, jusqu'à ses adieux le 2 juin 1995 devant un public ébloui qui lui offrit une standing ovation de vingt minutes. Entre-temps, il avait sillonné le monde, dansant en tant qu'étoile invité (guest star) pour une soixantaine de compagnies (dont l'Opéra de Paris, le Royal Ballet de Londres, l'Australian Ballet, le Ballet de Stuttgart, le Tōkyō Ballet, le Boston Ballet, le Ballet national du Canada...) dans trente-quatre pays. Il avait même, ironie du sort, été le premier danseur étranger invité au Bolchoï en 1987. Il avait eu les plus grandes partenaires : Margot Fonteyn, Natalia Makarova, Marcia Haydée, Gelsey Kirkland, Carla Fracci...
De talent, Bujones n'en manquait certes pas. Il naît le 9 mars 1955 à Miami (Floride, États-Unis), de parents Cubains. Après son divorce, sa mère, Mary Calleiro, retourne avec lui, alors âgé de cinq ans, à La Havane. Il commence la danse à l'école du Ballet national de Cuba vers sept-huit ans, sous la houlette d'Alicia Alonso, l'une des plus grandes étoiles du xxe siècle. En 1964, il revient à Miami avec sa mère. Cette dernière profite d'une tournée, dans cette ville, de Jacques d'Amboise, étoile du New York City Ballet, pour lui présenter son fils. Impressionné par les talents du jeune garçon, celui-ci le recommande auprès de l'école de l'American Ballet Theatre, école officielle du New York City Ballet alors dirigé par George Balanchine. Entré comme boursier en 1967, il y reste cinq ans. Il a pour professeurs André Eglevsky, Stanley Williams et José Imendez, qui deviendra son coach. En 1970, il fait ses débuts professionnels dans la compagnie d'André Eglevsky avant d'obtenir son diplôme de fin d'études en 1972. La même année, George Balanchine lui propose d'entrer au New York City Ballet. Bujones refuse, préférant danser à l'A.B.T. les chefs-d'œuvre classiques du xixe siècle. Soliste en 1973, il devient, en 1974, la plus jeune étoile de l'histoire de l'A.B.T.
Celui qui disait « s'être inspiré de la fougue de Rudolf Noureev et de la perfection d'Erik Bruhn » était un danseur éblouissant dont la force explosive étonnait, au vu de la finesse de sa charpente. Servi par sa souplesse et des jambes interminables, il avait à la fois une exactitude quasi mathématique dans la précision technique de ses pas, une puissance de saut surprenante, un élan incroyable dans ses tours qu'il finissait tout en douceur et une expressivité corporelle éloquente. Son visage aux traits énergiques se pliait parfaitement aux rôles dramatiques et son corps aux virtuosités les plus téméraires.[...]
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Écrit par
- Agnès IZRINE : écrivaine, journaliste dans le domaine de la danse
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