FIGUEROA CRISTÓBAL SUÁREZ DE (1571-? 1639)
Écrivain espagnol né à Valladolid, Cristóbal Suárez de Figueroa quitta la maison paternelle à dix-sept ans et passa une grande partie de sa vie en Italie. Après des études de droit à Bologne et Pavie, il exerça la profession de magistrat. Il eut des démêlés avec l'Inquisition, fut excommunié et emprisonné ; Philippe IV intervint en sa faveur. Renommé en son temps pour ses écrits, il l'était aussi pour son caractère irascible ; il s'en prit notamment à Cervantes et à Lope de Vega. El Pasajero (1617) est son œuvre essentielle. Il y met en scène quatre interlocuteurs, représentant chacun une condition sociale, effectuant ensemble un voyage qui les conduit de Madrid à Barcelone puis jusqu'en Italie : un docteur (l'auteur lui-même), un militaire, un maître ès arts et en théologie, un orfèvre. Les quatre voyageurs ont mille sujets de conversation : les femmes, l'amour, l'armée, la vie estudiantine, les métiers, la politique, la littérature, la poésie, le théâtre et les théories dramatiques, les écrivains à la mode... toute une époque défile dans ces tableaux de mœurs brossés avec beaucoup de piquant et d'alacrité. Au passage Figueroa ne se prive pas de cribler de ses flèches les gens de lettres : Quevedo, Cervantes, Alarcón, Arguijo... Avec El Viaje entretenido (1607) de Agustín de Rojas Villandrando et Guía y avisos de forasteros (1620) de Antonio Liñán y Verdugo, El Pasajero compose un remarquable triptyque reflétant les coutumes et les mentalités des Espagnols sous le règne de Philippe III (1598-1621). Outre des poésies d'intérêt mineur, Figueroa publia en 1609 La Constante Amarilis, roman pastoral à clefs. La bataille de Roncevaux lui inspira un poème épique, España defendida (1612). Plaza universal de todas las ciencias y artes (1615), en grande partie traduit de Piazza universale de Tomas Gazzoni, est une sorte de fresque encyclopédique agrémentée de considérations originales de l'auteur sur le thème qui lui tient à cœur, la satire de son époque. Ce livre vient ainsi compléter ou enrichir bien des sujets traités dans El Pasajero. Pusilipo (1629) contient un éloge de Góngora, étonnant de la part d'un ennemi du cultéranisme. Personnalité complexe, parfois sévèrement jugé en raison de l'âpreté de son caractère et de la violence de ses émotions, Suárez de Figueroa n'en reste pas moins un témoin incomparable et particulièrement lucide de son époque.
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Écrit par
- Bernard SESÉ : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española
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