FLEUVES
Facteurs abiotiques
Parmi les facteurs abiotiques réglant la vie des organismes et des communautés des cours d'eau, il faut considérer l'écoulement de l'eau (structure, débit, vitesse du courant), le substrat et les substances dissoutes (en particulier l'oxygène). À ces facteurs s'ajoute la température, qui agit directement sur la quantité d'oxygène disponible dans le milieu, donc sur la répartition des organismes.
L'écoulement de l'eau
Le régime des rivières et fleuves dépend des variations saisonnières du débit, et plusieurs types, selon l'origine des apports d'eau (fonte des neiges, pluies d'hiver ou d'été), ont pu être distingués. Les débits, qui se modifient très sensiblement, surtout au niveau des « confluences principales », exercent une influence sur la vie dans les cours d'eau par leurs variations saisonnières le long du réseau, leurs irrégularités, le transport des matériaux, l'action sur le degré de stabilité du fond.
En fonction de sa capacité de travail (déterminée surtout par la vitesse du courant) et de la quantité de matériel remplissant le lit, l'eau des ruisseaux et rivières peut exercer trois sortes d'actions : érosion, transport des matériaux et sédimentation (diagramme de Hjulström) ; d'énormes différences dans la nature des substrats, et par conséquent dans la composition des communautés, sont constatées dans les cours d'eau (ou leurs portions) selon que ce sont les phénomènes d'érosion ou de dépôts qui dominent. Dans les eaux de surface, le courant n'est qu'exceptionnellement laminaire ; il est normalement turbulent et devient parfois tourbillonnaire. Favorisant les échanges de substances dans l'eau, la turbulence est donc un des facteurs physiques essentiels pour les organismes vivant dans les eaux courantes. La différenciation entre milieux astatiques et milieux eustatiques (c'est-à-dire sujets à de brusques et importantes variations, ou au contraire peu sensibles aux crues et assèchements catastrophiques) se place dans ce contexte ; de remarquables mécanismes ont été développés par les animaux pour atténuer les conséquences de ces désastres.
L'importance de la pente a été soulignée par Huet dans son étude sur les relations entre la pente et les populations des eaux courantes (fig. 3) : les cours d'eau qui ont une longueur et une profondeur de même importance et qui possèdent une pente comparable ont, dans une région biogéographique donnée, des caractères biologiques analogues.
La vitesse du courant dépend du débit et de la structure du lit (profondeur, largeur, substrat) et est évaluée selon la taille des particules déplacées (échelle de Berg) : à 10 cm/s (vitesse lente) sont déplacés des objets de 0,2 mm de diamètre (le limon), à 300 cm/s (vitesse très rapide) des objets de 180 mm de diamètre (grosses pierres). Le courant modèle ainsi le substrat et l'allure du fond reflète fidèlement sa rapidité. Les inégalités de la répartition des vitesses au niveau du radier représentent un facteur extrêmement important dont il faut tenir compte pour ne pas avoir une image fausse ou appauvrie de la vie dans les cours d'eau : la « couche limite » (couche de Prandtl) et les « eaux mortes » en constituent un bon exemple. La couche limite est épaisse de un à plusieurs millimètres et offre des écoulements pratiquement laminaires et des vitesses le plus souvent très ralenties ; elle se forme à proximité immédiate de tout corps solide immergé et stationnaire. Les eaux mortes sont les zones à courant fortement ralenti qui se trouvent derrière les obstacles. Une importante partie de la vie dans les eaux courantes se déroule dans ces deux régions. Schématiquement, on peut dire que ce sont les vitesses extrêmes qui exercent l'action la plus importante : les plus grandes éliminant les éléments limnophiles tandis que les[...]
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Écrit par
- Lazare BOTOSANEANU : docteur ès sciences, chercheur scientifique principal, université d'Amsterdam
- Pierre CARRIÈRE : agrégé de géographie, docteur d'État ès lettres
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