DELAY FLORENCE (1941- )

Florence Delay est essayiste et romancière, comédienne, traductrice, scénariste. Elle a été élue à l'Académie française le 14 décembre 2000. Née à Paris le 19 mars 1941, elle fait ses études au lycée Jean de La Fontaine et à la Sorbonne. Attirée par le théâtre, elle est élève à l'école du Vieux-Colombier, puis régisseur-stagiaire de Jean Vilar au festival d'Avignon et assistante de Georges Wilson au T.N.P. En 1962, elle interprète le rôle-titre dans Le Procès de Jeanne d'Arc de Robert Bresson. Elle joue dans les films d'Adolfo Arrieta, de Hugo Santiago. Elle sera également coscénariste avec Benoît Jacquot, Michel Deville et Emilio Maillé. Agrégée d'espagnol, elle s'oriente vers la littérature générale et comparée qu'elle enseigne à la Sorbonne nouvelle. À partir de 1973, alternant romans et essais, elle publie, entre autres, L'Insuccès de la fête (1980), Riche et légère (prix Femina 1983) Course d'amour pendant le deuil (1986) et Dit Nerval (grand prix du roman de la Ville de Paris et prix de l'essai de l'Académie française 1999). Le théâtre, à travers l'Espagne et la traduction, est également très présent dans l'œuvre de Florence Delay. Elle adapte en français La Célestine de Fernando de Rojas pour Antoine Vitez au festival d'Avignon en 1989, puis en donne une version nouvelle pour Christian Schiaretti au T.N.P. en 2001. Elle traduit également des œuvres du Siècle d'or espagnol, et compose avec Jacques Roubaud un cycle de dix pièces, commencé en 1997 et achevé en 2005, Graal Théâtre, variation sur « la matière de Bretagne » et le cycle arthurien. Julie Brochen et Christian Schiaretti créent ainsi Merlin L'Enchanteur au T.N.S. (Théâtre national de Strasbourg) en 2012.

Dans Riche et légère, la narratrice parisienne fait retour à Malaga pour renouer avec son passé, fière d'une liberté qui tient, croit-elle, à son indifférence au temps et à l'amour : « Je n'ai vraiment connu Indio qu'après notre séparation... Connaître m'empêche d'aimer. » Cet homme énigmatique n'est autre que le père de la jeune femme. Une autre figure paternelle locale, le docteur, accompagne la narratrice ; celui-ci n'accorde aucune attention aux incertitudes existentielles de son amie puisque le malheur, pour un homme de cette trempe, se réduit d'abord à la guerre, l'exil, la torture, l'inconsolable pauvreté. Fille du professeur Jean Delay, écrivain et grande figure de la psychiatrie française, Florence Delay semble particulièrement attentive à la loi du père. Dit Nerval est ainsi un hommage, à la fois au poète des Nuits d'octobre et au père de Florence Delay, grand admirateur des Filles du feu. Jean Delay et Gérard de Nerval avaient l'un et l'autre un père médecin, le premier chirurgien, le second gynécologue. Ces fils uniques s'évadèrent d'un avenir médical tout tracé ; l'un devint « fou », l'autre « psychiatre ». Leur rapprochement vient de « leur grande lucidité et leur destinée invaincue ». Qu'il s'agisse de la protagoniste de Riche et légère qui amorce un mouvement vers l'élucidation des liens du passé, ou bien de Nerval au destin tragique mais qui vit une existence intense à travers son théâtre, ses critiques et ses déambulations, le salut vient du voyage dans un ailleurs historique et géographique. Nerval a redécouvert les trésors que sont les chansons anciennes, le fonds commun populaire des ballades, des rondes et des romances où la mort ne sépare pas ceux qui s'aiment. Tout aussi sensible à cet appel esthétique et sensuel de l'ailleurs, Florence Delay partage ce sentiment décuplé d'exister. En écho à L'Insuccès de la fête (1987), Il me semble, mesdames (2012) poursuit un tel élan. Les trente et une[...]