FELS FLORENT (1891-1977)
Florent Fels est né à Paris, à l'ombre de Saint-Gervais, non loin du ghetto parisien de la rue des Rosiers. De là, sa grand-mère le conduit souvent chez le grand critique d'art Théodore Duret où l'enfant découvre les impressionnistes. Sa mère, Agathe Restiau, est une robuste normande. Son père étant nommé directeur des finances à Lille, c'est dans cette ville qu'il va faire ses études ; à la faculté, il rencontre son meilleur ami, Pierre Bertin, qui prépare sa médecine alors qu'il est lui-même attiré par la philosophie. Leurs voies divergeront puisque leur vocation les entraînera l'un vers le théâtre, et Bertin deviendra le plus spirituel des sociétaires de la Comédie-Française, l'autre vers la critique d'art. Mais toute sa vie, Florent Fels sera attiré par les Flandres.
C'est pourtant à Paris que s'est déroulée la plus grande partie de sa carrière. Il a vingt et un ans quand éclate la Première Guerre mondiale. Il est mobilisé dans l'infanterie, et c'est seulement avec l'arrivée des Américains qu'il est chargé auprès d'eux d'une mission de liaison. Quand il est enfin démobilisé, il a obtenu la croix de guerre, la médaille de Verdun, la médaille de la Victoire, la Distinguished cross enfin.
Déjà, les goûts de Florent Fels le portent vers l'art et la littérature d'avant-garde. Arrivé de nuit en permission, il va frapper au petit matin à la porte du vieil immeuble du quartier Saint-André-des-Arts où habite un poète qu'il admire et, dans la chambre misérable de Blaise Cendrars, parlent longuement le jeune fantassin et celui qui, à la suite d'une blessure de guerre, vient d'être amputé d'un bras. À peine rendu à la vie civile il fonde une revue, Action, où, le temps de quelques numéros, s'expriment ses goûts libertaires dans le domaine de l'art comme dans celui des idées. Il aura pour premier collaborateur le poète Marcel Sauvage à qui viendront se joindre maints inconnus, parmi lesquels un certain André Malraux.
En 1922, deux jeunes gens, Maurice Martin du Gard et Jacques Guenne, décident de fonder le premier hebdomadaire destiné à mettre toutes les formes de la culture à la portée du plus grand nombre, Les Nouvelles littéraires. Fels a connu à Montmartre Frédéric Lefèvre, qui en est le rédacteur en chef et qui lui confie la rubrique des arts : c'est là que paraissent ses Propos d'artistes qui seront réunis en volume en 1925. Cette année est pour lui très importante, car il fonde avec Jacques Guenne L'Art vivant dont il sera le rédacteur en chef jusqu'à ce que la Librairie Larousse qui en est l'éditeur se sépare de cette revue.
Déjà, Florent Fels a publié ses premiers livres dans la collection qu'il a créée chez Stock et où se manifeste cette volonté d'initier à la peinture et à la littérature d'avant-garde les lecteurs les plus modestes. Dans ces petits volumes à couverture jaune, il publie lui-même un Vlaminck, un Van Gogh – de tous les peintres celui qu'il préfère et à qui il consacrera par la suite la première étude importante parue en France sur le Hollandais (1928). Gallimard publie en 1925 son Claude Monet (il était allé avec Vlaminck rendre visite au peintre à Giverny) ; les Chroniques du Jour, son Matisse (1929) ; la Librairie de France, son Utrillo (1930). Parallèlement, il poursuit sa carrière de journaliste. Au cours des années 1920, il a mené des grands reportages en Grèce, en Serbie, en Allemagne, en Italie pour Le Matin et L'Intransigeant. Puis Lucien Vogel crée un grand hebdomadaire illustré, Vu, et lui en offre la rédaction en chef. En 1931, il fonde Voilà qu'édite Gallimard. Il en restera le directeur jusqu'en 1940. L'année précédente, sitôt la guerre déclarée, il est devenu correspondant de guerre attaché au quartier général de[...]
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Écrit par
- Georges CHARENSOL : critique d'art
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