Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

FOLKLORE

Les genres

En guise de définition – et en raison du fait qu'il est si difficile de définir le folklore –, les savants de l'ère postérieure se sont souvent contentés d'énumérer les différents genres de celui-ci. De toute manière, la question du classement se pose de façon urgente à qui entreprend un manuel de folklore ; mais on n'y a répondu jusqu'à présent qu'empiriquement et au prix de pis-aller. La solution la moins satisfaisante est sans doute celle de Sébillot qui, dans les quatre volumes de son Folklore de France, adopte un principe de classification extérieur aux fonctions et aux mécanismes, ce qui l'amène à étudier successivement le folklore du ciel, de la mer, des montagnes, etc. La solution la moins mauvaise est celle de Van Gennep dans son Manuel tel qu'il existe actuellement, c'est-à-dire inachevé. Van Gennep utilise, en effet, un schéma théorique, celui des rites de passage, dont il est l'auteur et qui lui permet d'ordonner la multiplicité des faits selon un principe interne. Mais le plan de la suite de son œuvre, plan qui figure dans les deux tomes de la bibliographie, montre qu'il n'aurait pas échappé à une classification énumérative. Elle est cependant la meilleure, la plus complète et la plus raisonnée. Elle place en premier lieu les rituels et les pratiques – ainsi que les croyances qui leur sont associées – concernant la vie individuelle (« Du berceau à la tombe ») et l'année calendaire (cérémonies cycliques, saisonnières et calendaires). Devaient ensuite être étudiés le folklore de la nature (catégorie pratique mais peu scientifique), la magie et la sorcellerie, la médecine populaire (ces deux derniers domaines possédant des zones de recoupement), la musique, les chansons et les danses populaires, les jeux et divertissements, le folklore domestique, les arts populaires. En ce qui concerne la littérature populaire, Van Gennep introduit une distinction utile entre la littérature « mouvante » et la littérature « fixée ». La première comprend les contes et les légendes, qui présentent toujours des variantes ou des versions différentes selon l'époque, le lieu et même le conteur. En revanche, dictons, proverbes, sobriquets, formules ne se modifient pas : ils restent fixes ou disparaissent.

La littérature populaire (dite encore «   orale », en dépit de la contradiction entre ces deux termes) est quasiment à l'origine du folklore comme discipline, puisque, sous la forme de la poésie populaire nationale, c'est elle qui a suscité le mouvement de réaction contre l'esprit des Lumières à la fin du xviiie siècle. Elle est restée pour les folkloristes un objet d'étude privilégié, au point de s'identifier parfois au folklore tout entier, comme c'est encore le cas pour l'actuelle école finlandaise. Paradoxalement la France, qui avait été la première à s'intéresser aux contes grâce à Charles Perrault, dès la fin du xviie siècle, fut une des dernières parmi les nations européennes à en entreprendre une collecte sur des bases scientifiques. Les Histoires ou contes du temps passé de Perrault (1697) ont paru à une époque où les contes étaient à la mode, mais où bien peu d'auteurs recourent à la tradition : si Mme d'Aulnoy le fait pour une part des récits qu'elle publie (1697-1699), ses émules ignorent celle-là complètement ou presque. Avec Perrault, on saisit sur le vif le double sens du mot « populaire ». D'une part, il puise, en effet, ses thèmes dans la tradition populaire et leur donne une forme littéraire savante. Mais, d'autre part, il le fait avec un tel talent que son recueil obtient un succès populaire considérable et durable : populaire prenant ici le sens de « à la mode », « en vogue ». Ensuite cette version littéraire savante revient enrichir le répertoire populaire – au sens de[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

Classification

Média

Les frères Grimm - crédits : General Photographic Agency/ Hulton Archive/ Getty Images

Les frères Grimm

Autres références

  • BETTELHEIM BRUNO (1903-1990)

    • Écrit par
    • 1 064 mots

    Psychanalyste américain d'origine autrichienne, Bruno Bettelheim fit des études de psychologie et de psychiatrie à l'université de Vienne, sa ville natale. Il acquit ensuite une solide formation psychanalytique. D'origine juive, il est déporté, en 1938, à Dachau puis à Buchenwald, expérience...

  • BLUES

    • Écrit par
    • 3 668 mots
    • 5 médias

    Le blues prend forme vocale et instrumentale originale au sein de la population noire du sud des États-Unis d'Amérique dans la seconde moitié du xixe siècle. Né de l'esclavage, où les Noirs étaient traités plus comme un capital d'exploitation fermier ou ouvrier que comme des êtres...

  • CARNAVAL

    • Écrit par
    • 6 168 mots
    • 1 média
    ...fantastique se crée, avec des rites scrupuleusement respectés au fil du temps, des personnages de mondes merveilleux et monstrueux, tout droit tirés du folklore et des mythologies populaires. Attribut originel de la fête carnavalesque, le masque grotesque, le masque de déguisement, était à l'origine...
  • CHANSON

    • Écrit par , et
    • 7 139 mots
    • 6 médias
    ...Neveu de Rameauqui va introduire en Allemagne cette idée avant qu'elle ne revienne en France. Cette postulation d'un Volkslied, d'un folklore, va donner, dans la perception que le monde cultivé a du domaine des arts, son certificat de baptême à la chanson. Elle existe dorénavant et,...
  • Afficher les 26 références