FONCTION GRAMMATICALE ou FONCTION SYNTAXIQUE
On appelle fonction grammaticale ou fonction syntaxique, le rôle joué par un constituant (mot, syntagme, proposition) dans la structure grammaticale de la phrase. Une phrase n'est pas une pure juxtaposition de termes indifférenciés, elle est au contraire composée d'éléments qui contribuent, chacun dans son ordre, au fonctionnement syntaxique de l'ensemble.
Nature et fonction
La notion de fonction doit être distinguée de celle de partie du discours (ou catégorie morphosyntaxique) qui, elle, caractérise la nature d'un constituant. Or nature et fonction ne coïncident pas nécessairement. Une même catégorie peut assurer une pluralité de fonctions : ainsi, en français, un substantif peut être sujet (« Le soleil brille ») ou complément d'objet (« Je crains le soleil »). À l'inverse, une même fonction peut être assurée par plusieurs catégories : un substantif et une proposition peuvent tous deux, par exemple, être compléments d'objet (« Je crains le froid » et « Je crains qu'il ne soit en retard »).
La fonction d'un constituant est distincte de la place qu'occupe ce constituant dans la phrase. Il peut en effet conserver la même fonction dans des constructions où sa place varie ; ainsi le constituant « à son arrivée » est-il toujours complément circonstanciel dans des phrases telles que « À son arrivée, le président a salué la foule » ou « Le président a, à son arrivée, salué la foule ».
L'analyse des fonctions syntaxiques se heurte à de nombreux cas d'ambiguïté (pour une typologie raisonnée de telles ambiguïtés syntaxiques, voir Catherine Fuchs, Les Ambiguïtés du français, 1996). Une même fonction peut être marquée de plusieurs façons : en français, un complément circonstanciel est souvent introduit par une préposition (« À midi, il fait chaud »), mais pas toujours (« La nuit, tous les chats sont gris »). D'où certaines ambiguïtés concernant l'identification de la fonction d'un constituant : par exemple, dans « Il attend la nuit », le constituant « la nuit » est-il complément d'objet ou complément circonstanciel ? Par ailleurs, le point de rattachement d'un constituant est souvent difficile à déterminer : dans « un marchand de drap anglais », l'adjectif « anglais » est-il épithète de « drap » ou de « marchand » ?
Le travail du syntacticien consiste, pour une langue donnée, à établir la liste finie des fonctions grammaticales, à décrire les correspondances entre catégories et fonctions, et à rendre compte de la structuration syntaxique globale des constituants au sein de la phrase.
Héritée de l'Antiquité, l'analyse de la phrase fondée sur deux fonctions (sujet et prédicat) a prédominé jusque vers la fin du xviiie siècle : cette approche fut adoptée notamment dans la Logique (1662) de Port-Royal – preuve sans doute qu'il s'agit là d'une partition davantage logique que strictement linguistique. C'est à Dumarsais que l'on doit d'avoir introduit la notion de complément, notion ensuite reprise par Beauzée dans l'article « Régime » de l'Encyclopédie, et qui sera adoptée par toute la tradition linguistique ultérieure. Le complément peut être soit un complément de relation – tels le complément de nom ( « l'amour de Dieu ») et le complément d'adjectif (« fidèle à sa patrie ») – soit un complément de détermination – comme le complément d'objet direct (« écouter quelqu'un ») ou indirect (« obéir à quelqu'un », ou le complément circonstanciel (« travailler à Paris », « travailler pendant quarante ans », « travailler avec acharnement »).
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Catherine FUCHS : directrice de recherche émérite au CNRS
Classification
Autres références
-
GÉNITIF, grammaire
- Écrit par Robert SCTRICK
- 229 mots
Cas de la flexion dont le nom provient du fait qu'il permet d'identifier de façon certaine (casus genitivus, cas qui engendre) la base morphologique du thème. Le génitif est donc le seul cas à ne pas englober sous sa dénomination l'indication des fonctions syntaxiques qu'il assume par...
-
LA GRANDE GRAMMAIRE DU FRANÇAIS (A. Abeillé et D. Godard) - Fiche de lecture
- Écrit par Catherine FUCHS
- 1 886 mots
En ce qui concerne les fonctions syntaxiques, la GGFse démarque plus nettement puisque, sur les neuf fonctions proposées, seules deux (sujet et complément) sont reprises de la tradition ; les sept autres s’inspirent de courants linguistiques formels, soit les fonctions « tête », « spécifieur », « ajout... -
PSYCHOLOGIE DU LANGAGE ORAL
- Écrit par Elsa SPINELLI
- 4 407 mots
...mord la fille ». Les modèles de compréhension de phrases supposent l’existence d’un analyseur syntaxique (parseur) qui assigne à chaque mot reconnu une fonction grammaticale. Il s’agit de déterminer « qui fait quoi à qui ». Certaines phrases ont une structure syntaxique qui induit d’autres conclusions...