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FONCTION GRAMMATICALE ou FONCTION SYNTAXIQUE

Grammaires de dépendance et grammaires de constituants

La linguistique contemporaine a vu se développer diverses théories syntaxiques, dans lesquelles la notion de fonction occupe une place plus ou moins centrale selon les cas. Au tournant des années 1950-1960, deux grands types de grammaires ont été élaborés, que l'on a coutume de désigner respectivement sous les noms de « grammaires de dépendance » et « grammaires de constituants ».

C'est à Lucien Tesnière (Éléments de syntaxe structurale, 1959) que l'on doit d'avoir proposé une représentation de la phrase simple en termes de rapports de dépendance (appelés « connexions ») entre éléments. L'idée de base est que toute fonction se ramène à une relation entre un terme régissant et un terme subordonné qui en dépend. La phrase est représentée par une sorte d'arbre appelé stemma constitué de nœuds (termes) reliés par des traits verticaux marquant les rapports de dépendance entre ces termes – le nœud supérieur (appelé central), qui n'est lui-même régi par rien, étant le prédicat (verbal, nominal, adjectival ou adverbial, selon les cas). Le prédicat domine divers actants et circonstants : ainsi la phrase « Le signal vert indique la voie libre » sera représentée par un stemma où « indique » est le nœud central (prédicat verbal) régissant deux nœuds « signal » et « voie » (actants sujet et objet), qui eux-mêmes régissent respectivement les nœuds « le », « vert » et « la », « libre ». Chez Tesnière, la notion de fonction est essentielle dans l'élaboration de ce qu'il appelle la syntaxe dynamique, consacrée à la structuration de la phrase, et distincte de la syntaxe statique, dédiée à l'identification des catégories : selon lui, en effet, « il ne peut y avoir structure qu'autant qu'il y a fonction ».

L'approche syntaxique de la phrase en termes de constituants, instaurée par les distributionnalistes, se retrouve sous une forme plus élaborée dans la grammaire générative de Noam Chomsky. Dans son ouvrage de 1957 (Structures syntaxiques, 1969), Chomsky propose de représenter sous forme d'un arbre le découpage de la phrase en constituants immédiats. Techniquement, ce type de représentation se distingue de celui de Tesnière : il s'agit d'un arbre dont le nœud supérieur correspond à la phrase entière (et non pas au prédicat), et où le verbe ne régit pas son objet mais se trouve regroupé avec lui pour former un groupe verbal. Surtout, la notion de fonction n'est plus première pour l'élaboration théorique : c'est une notion dérivée, calculée à partir de la structure reliant des constituants définis en termes de catégories.

Certains formalismes syntaxiques plus récents, participant du courant dit des grammaires d'unification qui ont émergé dans les années 1980, ont tenté de se démarquer de cette approche en redonnant une place centrale à la notion de fonction et en dissociant l'analyse en fonctions de l'analyse en constituants. C'est le cas en particulier de la grammaire lexicale fonctionnelle de Joan Bresnan. L'information sur les constructions syntaxiques y est, pour l'essentiel, directement codée dans le lexique, où elle est décrite en termes de fonctions, et non de catégories. L'analyse syntaxique de la phrase se fait alors en appliquant des règles de dérivation très générales, et conduit à représenter, d'une part, la structure de constituants, et, d'autre part, la structure fonctionnelle.

Comme en témoignent les diverses approches qui viennent d'être évoquées, la notion de fonction est indissociable, sur le plan syntaxique, de celles de structure et de constituance.

— Catherine FUCHS

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