FONDAMENTALISME
Au sens premier : une réalité protestante
Au-delà de son sens générique, applicable à toutes les religions, le terme « fondamentalisme » renvoie à une réalité confessionnelle spécifique, celle du protestantisme. Comme le rappelle Jean-Paul Willaime, « chaque tradition religieuse produit des formes d'extrémismes qui lui sont propres et il n'est pas évident de rassembler sous un même concept les divers radicalismes religieux ». Il existe des termes appropriés pour caractériser les radicalités religieuses internes à l'islam (islamisme) et au catholicisme (intégrisme). Le mot « fondamentalisme » s'est forgé quant à lui dans le contexte protestant.
La contestation fondamentaliste s'est affirmée outre-Atlantique à la fin du xixe siècle. Ce courant émerge avec le cycle de conférences bibliques organisées à Niagara (Ontario) de 1883 à 1897. Entre 1910 et 1915, douze fascicules comprenant une centaine d'articles théologiques, tirés à trois millions d'exemplaires, furent publiés sous le titre The Fundamentals : A Testimony to the Truth. La montée du libéralisme théologique, assimilée à un déficit d'orthodoxie, en a constitué la cause immédiate. Hostiles à la pluralisation croissante des grandes dénominations, rétifs aux nouvelles exégèses, des protestants se sont cabrés au nom de la préservation des « fondamentaux » de la foi, à savoir l'incarnation de Jésus, Fils de Dieu et Dieu lui-même, sa naissance virginale, sa mort expiatoire sur la croix pour le salut des hommes, la résurrection corporelle, la réalité du péché qui sépare de Dieu et rend l'expiation nécessaire, le salut par la grâce et non par les efforts humains, et l'autorité de la Bible, « Parole inspirée de Dieu ».
Ce premier fondamentalisme protestant américain, aux ramifications internationales n'a pas défendu, à l'origine, de ligne séparatiste, contre-culturelle, mais a graduellement connu une radicalisation qui l'a conduit à renoncer au projet de régénérer le protestantisme dans son ensemble, au profit d'une ligne de plus en plus isolationniste et hostile au monde.
À partir de 1979, une inflexion s'est cependant fait jour. Des leaders fondamentalistes ont fait le pari d'une reconquête politique. Les télévangélistes Jerry Falwell (1933-2007, fondateur de la Moral Majority) et Pat Robertson (né en 1930, fondateur de la Christian Coalition) ont défrayé la chronique par leurs efforts répétés pour influer sur la scène politique. À l'aube du xxie siècle, le fondamentalisme américain est loin d'apparaître comme résiduel, il est toujours aussi actif que dans les années 1930, mais il a globalement échoué dans sa tentative de freiner la libéralisation de la société. Son influence, aujourd'hui, est plus variée qu'on ne l'imagine. L'horizon politique, survalorisé dans les médias, ne constitue qu'un des modes au travers duquel l'identité fondamentaliste s'exprime.
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Écrit par
- Sébastien FATH : agrégé d'histoire, chercheur au CNRS, laboratoire Groupe sociétés, religions, laïcités
Classification
Média
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