FONDS SOUVERAINS
Histoire de leur développement
Les pays émergents essayent depuis longtemps de s'affranchir des variations de prix des matières premières qu'ils possèdent en créant des fonds de stabilisation. Ces fonds existent depuis le début des années 1950. Le premier « fonds de richesse souveraine » est né en 1956 aux îles Kiribati, petit archipel de l'océan Pacifique, alors sous administration coloniale britannique. Leur administrateur, préoccupé par l'avenir des îles après l'épuisement de la ressource en phosphate, créa une taxe sur les exportations d'engrais pour assurer des revenus de remplacement lorsque le phosphate aurait disparu du sous-sol. En 2008, le fonds souverain des Kiribati gérait un demi-milliard de dollars, près de neuf fois le produit intérieur brut local. Dans le même esprit, fut créé en 1966 le fonds Pula avec les revenus des mines de diamants du Botswana (près de 7 milliards de dollars en 2007), ou encore le fonds chilien ESSF alimenté par les recettes du cuivre. De nombreux fonds souverains se sont créés après les chocs pétroliers de 1971 et 1973, dans le cadre d'un capitalisme d'État soucieux de préserver leur rente de la volatilité des cours des matières premières ou des métaux précieux. Ces fonds affichaient alors des objectifs très généraux : maintenir le développement à long terme de leur pays, financer l'éducation ou la santé, faire fructifier l'épargne pour les générations futures. Il en est ainsi du fonds A.D.I.A. (Abu Dhabi Investment Authority : 875 milliards de dollars en 2007) créé en 1976 par les Émirats arabes unis sur la base des richesses pétrolières.
À l'échelle européenne, la Norvège a créé au début des années 1990 l'un des plus gros fonds (plus de 315 milliards d'actifs pour un produit intérieur brut de 295 milliards de dollars) alimenté par les excédents de réserve de change générés par l'exploitation du pétrole. Ce fonds est le seul à privilégier des critères non financiers parmi lesquels des préoccupations éthiques ou environnementales. Souvent présenté comme un modèle en matière de transparence, ce fonds suit une logique d 'investissement responsable. Il s'applique à ne jamais dépasser 1 p. 100 du capital de l'entreprise auquel il participe et à exclure les secteurs (l'armement, le tabac, les entreprises polluantes, etc.) qui ne répondent pas aux critères de l'investissement socialement responsable (I.S.R.). C'est ainsi qu'en septembre 2008, il a exclu Rio Tinto de la liste des entreprises bénéficiant de ses investissements en raison des dégâts infligés à l'environnement par ce groupe anglo-australien. De nombreuses entreprises dont Boeing, Thales, Lockheed Martin, Wal-Mart, E.A.D.S. ou B.A.E. Systems figurent sur sa liste noire.
Des fonds souverains existent également dans des pays qui n'exportent pas de matières premières mais transforment celles qu'ils importent pour vendre leurs produits finis au reste du monde. C'est le cas de pays asiatiques tels Singapour, la Corée du Sud ou la Chine. La Chine a accumulé des excédents commerciaux (400 milliards de dollars par an) et des réserves de change gigantesques (évaluées à 1 400 milliards de dollars) qui lui ont permis de créer en septembre 2007 un fonds souverain, la China Investment Corporation (C.I.C.) doté de 200 milliards de dollars.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Françoise PICHON-MAMÈRE : maître de conférences, université Paris-Sorbonne
Classification
Autres références
-
LAND GRABBING ou ACCAPAREMENT DE TERRES AGRICOLES
- Écrit par Jean-Paul CHARVET
- 4 982 mots
- 4 médias
Il est toutefois important de préciser que bon nombre de fonds privés sont en réalité des fonds d'État. Il en est ainsi de la firme chinoise China National Cereals Oils and Foodstuffs Import and Export Corporation, dont les cadres sont payés par le gouvernement de Pékin et dont les cadres exécutifs... -
QATAR
- Écrit par André BOURGEY et Philippe DROZ-VINCENT
- 5 859 mots
- 5 médias
Enfin, le Qatar, copiant le Koweït, a créé en 2005 un fonds d'investissement, le Qatar Investment Authority (capitalisé en 2011 à hauteur de 100 milliards de dollars). Après avoir perdu beaucoup d'argent en raison de la crise asiatique de 2008, ce fonds souverain mène une politique d'acquisitions...