FORMALISME (arts)
Diffusion du formalisme
En France, le formalisme a suivi une tout autre ligne de développement. Il prend la forme d'une « grammaire » systématisée des arts décoratifs et du dessin chez le théoricien de l'art Charles Blanc (1813-1882). La célèbre formule manifeste du peintre nabi Maurice Denis (1890) – « Se rappeler qu'un tableau, avant d'être un cheval de bataille, une femme nue, ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées » – renvoie elle aussi le sujet au second rang et restitue au tableau, au « pictural », sa primauté. En ce sens, elle correspond également à une attitude formaliste, qui gagne à ce moment la critique comme les ateliers.
Pour autant, c'est Henri Focillon (1881-1943) qui devait donner à la pensée formaliste un de ses aboutissements les plus originaux. Là encore, le modèle architectural est essentiel : le développement de la sculpture romane est analysé par Focillon comme une dialectique subtile entre le mouvement de la figure et l'ordre imprimé par le cadre architectural qui lui sert d'écrin. La question des cycles historiques est également présente dans Vie des formes (1934), où l'auteur tente de mettre en évidence, sous la complexité des lignes d'évolution multiple de l'art, un déploiement de phases faisant régulièrement retour, et menant de l'expérimental au classique, puis du raffinement au baroque.
Longtemps, ce paradigme formaliste qui, selon Hans Belting, « posait la forme artistique en héros solitaire parmi les événements qui se succèdent », aura permis à l'histoire de l'art de se présenter comme une matière unifiée. Notre concept de l'art est désormais fragmenté, aucun modèle ne pouvant prétendre à la même généralité, aucune méthode n'étant susceptible de nous faire croire à la perspective unifiée d'une histoire de l'art universelle. L'art se présente moins aujourd'hui comme une histoire des formes que comme un agrégat de mondes de l'art justiciables d'une analyse en termes anthropologiques. Les horizons multiculturels et « globaux » dans lesquels nous évoluons ont rendu incertaine la notion idéale et stable de l'art qui avait fondé l'histoire des formes.
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Écrit par
- François-René MARTIN : ancien pensionnaire à l'Institut national d'histoire de l'art, chargé de cours à l'École du Louvre
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