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QUADRATIQUES FORMES

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Formes quadratiques sur un corps

Nous distinguons deux cas, suivant que la caractéristique du corps de base K est distincte de 2 ou égale à 2.

Corps de caractéristique ≠ 2

Résultats généraux

On peut se borner ici à considérer le problème de transformation d'une forme quadratique en une autre sous la forme (3). Un premier invariant est le rang de la matrice T d'une forme quadratique Q ; il est aussi appelé rang de Q ou rang de la forme bilinéaire associée B, et noté rg(Q) ou rg(B). C'est un entier qui peut prendre l'une quelconque des valeurs entre 0 et la dimension n de l'espace vectoriel V où est définie Q. On dit que la forme Q (ou B) est non dégénérée si rg (Q) = n ; la forme bilinéaire B définit alors un isomorphisme ϕ de V sur son dual V* (cf. algèbre linéaire) par la relation :

pour x et y dans V ; cela permet de définir dans V les notions de vecteurs orthogonaux, de sous-espace isotrope et de sous-espace totalement isotrope (cf. groupes [mathématiques] - Groupes classiques et géométrie, chap. 3).

Un second invariant est l'indice de Witt ν ≤ n/2 (cf. groupes [mathématiques] - Groupes classiques et géométrie, chap. 3) ; l'espace V se décompose en somme directe d'un sous-espace W de dimension n − 2ν, ne contenant aucun vecteur isotrope ≠ 0, et d'un sous-espace orthogonal à W, dans lequel l'indice de Witt de la restriction de Q à ce sous-espace est ν ; pour n et ν donnés, la classe d'équivalence de la forme QW, restriction de Q à W, détermine entièrement celle de Q, ce qui permet de ramener le problème d'équivalence au cas des formes anisotropes (c'est-à-dire d'indice 0).

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On appelle discriminant de Q (ou de B) par rapport à une base de V le déterminant de la matrice de B par rapport à cette base ; comme la relation (3) entraîne :

on voit que le discriminant dépend de la base choisie, mais sa classe d(Q) dans le groupe quotient K*/K*2 du groupe multiplicatif K* de K par le sous-groupe des carrés dans K* est un invariant de Q.

Enfin, pour deux éléments α et β de K, on désigne par (α, β) l'algèbre de quaternions (généralisés), espace vectoriel de dimension 4 sur K ayant une base formée de 1 (élément unité) et de trois éléments x1, x2 et x3 avec la table de multiplication :

C'est une algèbre simple de centre K, si αβ ≠ 0. Cela étant, il y a toujours des bases (ej), 1 ≤ j ≤ n, de V orthogonales pour Q, autrement dit telles que :

ainsi Q(x) est somme de « termes carrés ». On appelle algèbre de Hasse de Q pour cette base le produit tensoriel des algèbres de quaternions (αj, α1 α2 ... αj), pour 1 ≤ j ≤ n, et on démontre que cette algèbre S(Q) ne dépend pas, à isomorphie près, de la base orthogonale choisie.

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On peut prouver que, pour n ≤ 3, les invariants rg(Q), d(Q) et S(Q) caractérisent, à équivalence près, les formes quadratiques sur un corps quelconque K (de caractéristique ≠ 2) ; mais cela n'est plus exact pour n ≥ 4. On n'a, dans ce cas, que des résultats pour des corps particuliers.

Résultats spéciaux

a) Le corps K est algébriquement clos ; un seul invariant suffit, le rang rg(Q) ; pour rg(Q) = n, on a ν = [n/2], partie entière de n/2.

b) Le corps K est le corps R des nombres réels ; pour toute base orthogonale (ej) de V, si :

le nombre p (resp. q) des αj qui sont > 0 (resp. < 0) est indépendant de la base choisie (« loi d'inertie » de Sylvester) ; on dit que (p, q) est la signature sig (Q) de Q ; les nombres p et q caractérisent les formes quadratiques à équivalence près ; on a rg(Q) = p + q ; si p + q = n, on a ν = inf (p, q) et d(Q) est la classe de (− 1)q. Le groupe R*/R*2 a ici deux éléments.

c) Le corps K est fini ; dans ce cas, le groupe K*/K*2 a encore deux éléments ; les invariants rg(Q) et d(Q) caractérisent Q, à équivalence près ; si rg(Q) = n, on a ν ≥ 1 pour n ≥ 3.

d) Le corps K est un corps local (cf. théorie des nombres - Nombres p-adiques), d'idéal maximal P. Pour deux éléments α et β de K, le symbole de Hilbert (α, β)P est défini comme égal à 1 si l'équation αξ2 + βη2 = 1 a une solution dans K, comme égal à − 1 dans le cas contraire (cf. divisibilité, chap. 4) ; et on montre que deux algèbres de quaternions (α, β) et (α′, β′) sont isomorphes si et seulement si on a (α, β)P = (α′, β′)P. On associe alors à la forme quadratique Q son symbole de Hasse SP(Q), égal par définition au produit des symboles de Hilbert (αj, α1 α2 ... αj)P pour toute expression (4) de Q à l'aide d'une base orthogonale. On prouve que les invariants rg(Q), d(Q) et SP(Q) caractérisent Q, à équivalence près. On a toujours ν ≥ 0 pour rg(Q) ≥ 5.

e) Le corps K est un corps de nombres algébriques (cf. théorie des nombres - Nombres algébriques). Pour toute place v de K, le corps K se plonge canoniquement dans le corps local complété Kv, et on peut donc considérer une forme quadratique Q sur K comme une forme quadratique Qv sur Kv. La théorie est entièrement ramenée au cas des corps locaux par le principe de Hasse : pour qu'une forme quadratique Q′ soit transformée d'une forme Q, il faut et il suffit que Q′v soit transformée de Qv pour chaque place v (finie ou à l'infini). Les invariants rg(Q), d(Q), SP(QP) pour toute place finie, et sig(Qv) pour toute place réelle à l'infini, caractérisent donc Q, à équivalence près (théorème de Hasse-Minkowski). Les symboles SP(QP) sont égaux à 1, sauf pour un nombre fini de places finies P, et on a la loi de réciprocité de Hilbert :

Corps de caractéristique 2

Soit K un corps de caractéristique 2, V un espace vectoriel de dimension n sur K et Q une forme quadratique sur V. La forme bilinéaire B associée à Q est alors alternée, autrement dit B(x, x) = 0 pour tout x ∈ V ; son rang rg (B) est par suite un nombre pair 2p. Soit V⊥ le sous-espace de V, formé des x ∈ V tels que B(x, y) = 0 pour tout y ∈ V ; sa dimension est n − 2 p et on a :

pour x et y dans V. L'ensemble V0 des x ∈ V⊥ tels que Q(x) = 0 est donc un sous-espace vectoriel de V. Si q ≤ n − 2 p est sa dimension, on dit que 2 p + q est le rang rg (Q) et on appelle défaut de Q l'entier δ(Q) = q = rg (Q) − rg (B). Si U est un supplémentaire de V0 dans V⊥, si W est un supplémentaire de V⊥ dans V et si l'on prend une base de V qui soit réunion d'une base symplectique (ej), 1 ≤ j ≤ 2 p, de W (c'est-à-dire telle que B(ej, ek) = 0 sauf pour les couples (ej, ej+p), pour lesquels B(ej, ej+p) = B(ej+p, ej) = 1 pour 1 ≤ j ≤ p), d'une base (ej), 2 p + 1 ≤ j ≤ 2 p + q, de U et d'une base (ej), 2 p + q + 1 ≤ j ≤ n, de V0, alors on obtient, pour :
  l'expression de Q(x) suivante :
où la relation :
entraîne ξj = 0 pour 2p + 1 ≤ j ≤ 2p + q. Le défaut q ne peut être > 0 que si K est imparfait, c'est-à-dire que le sous-corps K2 de K formé par les carrés des éléments de K est distinct de K ; plus précisément, on a q ≤ [K : K2].

Les entiers p et q sont évidemment des invariants de Q. On dit qu'un sous-espace L de V est totalement singulier si Q(x) = 0 dans L ; pour les formes de rang n, la dimension d'un tel espace est ≤ p. Le maximum ν des dimensions des espaces totalement singuliers est encore appelé l'indice de Witt de Q et est un invariant de cette forme.

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Si, pour une base (ej) choisie comme plus haut, on forme l'élément :

on dit que cet élément est le pseudo-discriminant (ou invariant d'Arf) de Q par rapport à cette base. Pour une autre base du même type, le pseudo-discriminant est de la forme :
pour un élément ξ ∈ K ; comme les éléments ξ2 + ξ forment un sous-groupe P du groupe additif K, la classe d(Q) de Δ(Q) dans le groupe quotient K/P est encore un invariant de Q.

Enfin, on peut généraliser aux corps de caractéristique 2 la notion d'algèbre de quaternions et obtenir ainsi pour Q un invariant qui généralise l'algèbre de Hasse définie supra (cf. Résultats généraux, in Corps de caractéristique ≠ 2). Grâce à ces invariants, on peut, pour certains corps de caractéristique 2, obtenir une classification complète des formes quadratiques sur ces corps.

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  • HECKE ERICH (1887-1947)

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    Né à Buk (Posnanie), Hecke fut l'élève de Hilbert à Göttingen, où il soutint sa thèse en 1912. Il enseigna brièvement à Bâle et à Göttingen, puis à Hambourg à partir de 1919, où il demeura jusqu'à sa mort.

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