FOSSILE, notion de
Le terme fossile dérive du latin fodere, qui signifie « creuser », « extraire en creusant ». Jusqu'au xviiie siècle, il désignait non seulement les restes « pétrifiés » de plantes et d'animaux, mais aussi toute substance extraite du sol ou du sous-sol (roches, minéraux, minerais...). Ce n'est qu'à la suite d'un long débat, remontant à l'Antiquité, que la thèse de l'origine organique des fossiles d'aspect animal ou végétal finit par s'imposer voici environ deux siècles : il s'agissait là non pas de simples « jeux de la nature » se formant spontanément dans le sol, mais bien des restes d'êtres vivants ayant vécu dans le passé et que les roches avaient conservés en leur sein (comme le démontra, dès le milieu du xviie siècle, le savant danois Nicolas Sténon). Cette définition moderne des fossiles recouvre donc des objets très divers, d'origine animale ou végétale, ayant subi, après leur enfouissement, des transformations plus ou moins profondes (minéralisation, etc.). Elle concerne non seulement les restes des organismes eux-mêmes, mais aussi les résultats de leurs activités : traces de locomotion, terriers, œufs, etc.
La fossilisation est un phénomène complexe qui aboutit à des résultats variés : dans le cas d'un mammouth découvert dans le sol gelé de l'Arctique, c'est le cadavre lui-même qui est conservé presque sans changement, mais, à l'autre extrême, un fossile peut être un moulage naturel qui ne reproduit, par exemple, que la forme d'une coquille alors entièrement remplacée par de la roche. Fréquemment, il subsiste une partie du matériau biologique d'origine, combinée à des substances minérales ayant pénétré le fossile après son enfouissement. La science qui étudie les fossiles est appelée paléontologie.
Les fossiles et le passé de la Terre
Dans une conception de l'histoire de la Terre profondément marquée par le récit de la Genèse, le Déluge biblique fut souvent invoqué autrefois pour expliquer la formation des fossiles, considérés comme les restes d'êtres vivants victimes de cette inondation généralisée. Ils ne témoignaient ainsi que d'un événement unique. Dès le xviie siècle, pourtant, certains savants, comme Robert Hooke en Angleterre, voyaient en eux des « médailles de la Création », des documents pouvant servir à reconstituer l'histoire lointaine du monde. Bien que l'idée ait été reprise notamment par Buffon, il fallut attendre la fin du xviiie siècle pour que cette approche soit réellement mise en pratique, avec notamment les travaux du topographe anglais William Smith, qui constata que les couches géologiques pouvaient être caractérisées par les fossiles qu'elles contiennent. C'est sur cette base que put s'édifier la stratigraphie, la science qui étudie les couches géologiques ou strates : celle-ci rendait possible une reconstitution de l'histoire géologique de notre planète, qui se révélait beaucoup plus longue que ce que les chronologies bibliques envisageaient.
Les différences observées entre les fossiles mis au jour dans les différentes formations géologiques témoignaient de changements considérables, survenus au cours du temps, dans la faune et la flore. Seul le concept d'extinction des espèces pouvait rendre compte de ces différences, mais il se heurta longtemps à des objections théologiques et philosophiques (des éléments de la Création divine avaient-ils pu disparaître totalement ?). Au tournant des xviiie et xixe siècles, l'évidence finit par s'imposer, grâce notamment aux travaux de Georges Cuvier : les fossiles montraient de façon indiscutable que de très nombreuses espèces animales et végétales s'étaient éteintes sans descendance. Qui plus est, la distribution des fossiles dans les strates de l'écorce terrestre révélait une succession[...]
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Écrit par
- Eric BUFFETAUT : directeur de recherche émérite au CNRS
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