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FRANCE, archéologie

L’archéologie dans les institutions

Dans les années 1970, une enquête conduite à la suite du rapport Soustelle avait recensé 632 archéologues professionnels en France, dont un tiers seulement se consacraient à l’archéologie métropolitaine. Par ailleurs, les deux tiers appartenaient à l’université et au CNRS, le dernier tiers se répartissant entre le ministère de la Culture et celui des Affaires étrangères. Dans les années 2020, ce chiffre se trouve donc multiplié par sept, tandis que l’archéologie française à l’étranger – même si elle repose sur ses cinq grandes écoles et une dizaine d’instituts dans différents pays – est passée à l’arrière-plan, y compris au niveau des budgets, d’autant que la situation géopolitique s’est dégradée dans de nombreuses régions. Les évolutions ont cependant été diverses selon les institutions.

Du point de vue de la formation, dans les années 2020, l’archéologie est enseignée dans une quinzaine d’universités françaises (sur 80), avec des cursus quasiment complets, incluant les trois années de licence, les deux années de master, et pouvant se poursuivre avec un doctorat. Plusieurs universités proposent également un enseignement spécialisé (master) en archéologie préventive. Le nombre d’enseignants-chercheurs universitaires, de l’ordre de plusieurs centaines, a donc beaucoup augmenté en archéologie, même si les crédits de fonctionnement demeurent faibles. À cela s’ajoutent plus de 200 contrats doctoraux (pour la réalisation d’une thèse) et postdoctoraux, tous deux à durée limitée.

En revanche, au CNRS, la situation s’est plutôt dégradée. Certes, la multiplication des petites équipes a fait place au fil du temps à de grands regroupements au sein d’unités mixtes de recherche (UMR), associant universitaires, chercheurs, doctorants et souvent membres de l’INRAP, de services du ministère de la Culture ou de collectivités. Mais il n’existe souvent plus qu’une ou deux UMR par université. Et, d’une part, les recrutements au CNRS connaissent une baisse tendancielle, réduits à une dizaine de postes annuels au mieux. D’autre part, pour avoir des moyens, les chercheurs doivent présenter des projets, en général sur trois ans, à l’Agence nationale de la recherche (ANR) voire, au niveau européen, à l’European Research Council (ERC), dont les budgets sont importants, mais où seulement 15 % en moyenne des candidatures sont retenues, d’où de considérables pertes de temps et d’énergie. Le financement d’une recherche pérenne n’est plus garanti.

Les moyens de la sous-direction de l’archéologie au ministère de la Culture et de ses services archéologiques en région n’ont pas non plus augmenté, quand ils ne connaissent pas une certaine érosion, y compris budgétaire. L’émergence de l’archéologie préventive a en outre entraîné une surcharge de travail pour l’instruction des dossiers, et le contrôle des opérations, aggravé par la nécessaire gestion du système concurrentiel, laisse en réalité peu de place à la recherche pour des personnels en principe scientifiques. Le redécoupage administratif en grandes régions n’a pas simplifié l’organisation du travail. De plus, les liens se sont distendus, à la faveur de la décentralisation, entre le pouvoir central et les services en région, organisés au sein des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), avec un poids croissant des préfets, l’archéologie préventive pouvant être parfois politiquement sensible. Or ce sont les préfets qui, en définitive, avalisent ou annulent les prescriptions des services archéologiques. Ces services ont aussi pour tâche de dresser la Carte archéologique nationale, c’est-à-dire le fichier de tous les sites archéologiques connus, soit environ 600 000 à ce jour, sur un potentiel estimé entre 5 et 10 millions. Son accès est évidemment contrôlé.[...]

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  • : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France

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Napoléon III inaugurant le musée des Antiquités nationales - crédits : MAN, centre des archives, collection Presse/MAN/ Valorie Gô

Napoléon III inaugurant le musée des Antiquités nationales

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Fouille de la cour Napoléon du Louvre

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