- 1. La commande au service du pouvoir
- 2. Le Front populaire inscrit l'art dans l'espace public
- 3. Le retour de la sculpture
- 4. La commande publique revisitée
- 5. Une nouvelle impulsion politique
- 6. Comment déconcentrer la commande publique ?
- 7. Des commandes autour des tramways
- 8. Bibliographie
- 9. Vidéographie
FRANCE (Arts et culture) L'art public
Depuis les années 1980, en France, la politique de commandes d'œuvres d'art s'est développée en partenariat avec les régions et les collectivités territoriales. Adaptée à l'art d'aujourd'hui, cette procédure offre désormais un outil expérimental très sollicité à travers le territoire au bénéfice de projets artistiques inédits, adressés à la collectivité tout entière.
Que signifie l'expression « art public » ? La commande publique ne concerne pas uniquement l'érection d'une statue (équestre, funéraire, ornementale), d'un monument figé pour l'éternité, ni même la conception d'un décor. Bien au contraire, commanditaires et artistes ont cherché à rompre avec cette terminologie pour confronter le passant de la fin du xxe siècle à des formes nouvelles : une inscription murale (Lawrence Weiner sur le phare de Calais ou dans le jardin des Tuileries à Paris), des caissons lumineux (Mario Merz à Strasbourg), des médaillons inscrits dans le sol (Jan Dibbets à Paris), du mobilier (Maarten van Severen pour les abords du pont du Gard), le traitement d'une place (Blériot en dentelle de François Morellet à Calais en 1986 ou en 2000 le traitement de la place du Pot d'étain à Pont-Audemer par Élisabeth Ballet) ou encore de la poésie (l'Oulipo à Strasbourg). La notion d'espace public s'est d'ailleurs considérablement diversifiée et complexifiée. Si l'espace public fait immédiatement allusion à la ville, d'autres espaces sont à investir, et notamment l'espace virtuel du Web et des nouvelles technologies qui ne sauraient échapper aux créateurs.
La commande au service du pouvoir
À l'issue de la Révolution française, la commande est essentiellement un outil au service du pouvoir servant à magnifier l'image de l'État. Le xixe siècle, le siècle de la « statuomanie », multiplie les commandes de sculptures destinées à orner arcs historiés, façades d'édifices, monuments funéraires, civils ou religieux. La commande assure aussi le maintien de la peinture d'histoire, du décor, du portrait ou de l'ornement peints ou sculptés.
Pour financer ces réalisations, de nombreuses souscriptions publiques sont alors ouvertes par une municipalité, une société savante ou un groupe de personnes. La souscription publique s'accompagne de la mention « Monument offert par souscription », qui a plus d'importance dans certains cas que le nom du sculpteur. La fidélité au programme défini en amont – thème, support, dimensions, matériaux et iconographie – demeure essentielle et prime souvent sur la qualité artistique des projets retenus.
Avec la commande des Bourgeois de Calais (1889), Rodin est le premier artiste à rompre avec cette soumission aux contraintes imposées par le commanditaire. Il réussit à imposer son point de vue, en réduisant la hauteur du socle, habituellement monumental et inaccessible, pour mettre le groupe sculpté à la portée du public. Il installe ainsi la première sculpture publique « indépendante » dans la ville. Mais cette « audace » devait provoquer, pour plusieurs décennies, le « divorce » entre la sculpture contemporaine, dont le musée allait devenir l'unique lieu de présentation, et l'opinion publique.
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Écrit par
- Caroline CROS : conservateur du Patrimoine, inspectrice de la création artistique, direction générale des créations, ministère de la Culture et de la communication
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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Média