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FRANCE L'année politique 1998

L'impossible union de la droite

Les résultats médiocres de la droite, son discrédit dans l'opinion, les accommodements de certaines personnalités avec le Front national obligeaient l'opposition à réagir. Toutefois, les recompositions internes sont apparues aux yeux du public plus comme des manœuvres d'état-major ou l'expression de tactiques individuelles que comme la formulation d'une nouvelle identité de droite autour d'un programme clair. C'est à l'U.D.F. que les mouvements ont été les plus marqués : à la suite d'une offensive lancée contre le président de la confédération, François Léotard, François Bayrou devait en conquérir en septembre 1998 la présidence avant d'en faire un parti unifié lors de la réunion de son conseil national le 29 novembre. Cette fusion, accomplie sans Démocratie libérale, consacrait la prise de distance à l'égard de l'U.D.F. annoncée en mai par le parti d'Alain Madelin. L'attitude ambiguë de la direction de ce parti envers les présidents de région élus avec les voix de l'extrême droite suscita d'ailleurs le ralliement à l'U.D.F. de certaines de ses personnalités, comme Gilles de Robien.

Du côté du R.P.R., Charles Pasqua réactiva, en juin, son association Demain la France pour en faire un parti politique, avant de démissionner de la direction nationale du mouvement gaulliste en décembre. Malgré des débats importants, notamment sur l'Europe, le R.P.R. devait réaffirmer son unité autour de Philippe Séguin, réélu en décembre par les militants président du parti, tandis que Nicolas Sarkozy était confirmé au poste de secrétaire général. Les rivalités internes, apparemment apaisées (ainsi de la querelle qui, à l'hôtel de ville de Paris, opposa les partisans du maire, Jean Tiberi, à ceux de Jacques Toubon), n'en demeuraient pas moins. Par ailleurs, le trouble a parfois pu être jeté par les propos de certaines personnalités ; ainsi lorsque Édouard Balladur, en juin, proposa de rouvrir le débat sur la préférence nationale. L'unité du R.P.R., tant du point de vue de l'idéologie que de celui des hommes, est apparue précaire.

En ce qui concerne l'union de l'opposition, les tentatives se sont révélées peu fructueuses. Certes, a été créée L'Alliance, qui regroupe les composantes de l'opposition ayant refusé tout accord avec le Front national (R.P.R., U.D.F., D.L.). Mais en raison des dissensions internes, accrues au cours de l'année 1998 pour des raisons tactiques et parfois de fond (conception de l'Europe notamment), celle-ci ressemble plus à une coquille vide qu'à une structure confédérale capable d'imposer des mots d'ordre et des candidats communs. Le coup de grâce semble avoir été porté lors de l'élection du président du Sénat, amèrement ressentie par la famille centriste, et la cause entendue avec le revirement du R.P.R. lors de l'élection d'Anne-Marie Comparini à la présidence de la région Rhône-Alpes.

Le jeu politique fut troublé aussi par l'émergence d'un nouvel acteur, La Droite, mouvement créé par Charles Millon après son éviction de l'U.D.F. Celui-ci a tenté de fédérer, autour d'une idéologie peu lisible, les électeurs de droite déçus par les partis classiques et peu sensibles à la compromission de son président avec les élus frontistes. La droitisation de Démocratie libérale et la présence du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, comme du Front national, a fortiori depuis la scission de ce dernier concurrencent toutefois ce projet.

C'est dans ce contexte de relative confusion, peu propice à l'émergence d'une personnalité consensuelle et capable, par son charisme, de mettre un terme aux divisions, qu'il faut comprendre le jeu politique de Jacques Chirac. Soucieux[...]

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Écrit par

  • : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris

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