FRANCE L'année politique 1998

Une scission de l'extrême droite à l'issue incertaine

L'événement politique majeur de l'année 1998 est l'éclatement du Front national entre les fidèles de son président fondateur, Jean-Marie Le Pen, et ceux de son ancien délégué général, Bruno Mégret. Si la rivalité entre les deux hommes était sensible depuis plus d'un an, elle avait toujours été démentie par les intéressés jusqu'en novembre-décembre. La bataille pour la désignation de la tête de liste du Front aux européennes de 1999 en fut la première manche. Elle se conclut par l'éviction, accompagnée d'une accusation de « félonie », de Bruno Mégret et de certains de ses lieutenants, et par la convocation d'un conseil de discipline. Pendant ce temps filtrait dans la presse un document rédigé par les mégretistes sur les « brimades » dont ils faisaient l'objet. Ces derniers, forts du travail minutieux réalisé dans les fédérations, demandaient la convocation d'un congrès extraordinaire – opération qui mit le feu aux poudres. L'idéologie des deux dirigeants F.N. est certes, malgré une apparence plus « moderniste » et policée du second, rigoureusement similaire, et il est juste de voir d'abord dans cette lutte frontale une bataille pour le leadership. En revanche, les choix stratégiques des lepénistes et des mégretistes ne sont pas identiques. Tandis que les premiers affirment refuser toute alliance avec la droite classique, les seconds en ont fait le fondement de leur stratégie. Sans rien renier de leurs propres idées, ils entendent l'inciter à faire alliance avec le Front lors de duels avec la gauche. En cherchant à apparaître plus respectables, les amis de Bruno Mégret veulent rendre possible l'union de toutes les droites, dont ils entendent, le moment venu, prendre la tête.