FRANCE L'année politique 2002
La quasi-union de la droite
L'union de la droite a longtemps été l'arlésienne de la vie politique française. Réclamée par une majorité de ses électeurs, elle s'était jusqu'alors bornée à des alliances électorales de circonstance et sans lendemain, alors même que la division de la droite est, depuis 1981, apparue comme l'une des causes majeures des défaites électorales qu'elle a pu subir. Avec la création de l'U.M.P., dont le congrès fondateur eut lieu le 17 novembre 2002, une nouvelle étape est franchie : le R.P.R., Démocratie libérale et le Parti radical valoisien disparaissent et une majorité des anciens membres de l'U.D.F. rejoignent l'U.M.P. Ce mouvement avait été engagé dès 2001 avec la création de l'Union en mouvement. Co-animée, sous le regard bienveillant de l'Élysée, par trois jeunes parlementaires, Renaud Dutreil, Hervé Gaymard et Dominique Bussereau, l'U.E.M. allait devenir U.M.P. (alors Union pour la majorité présidentielle) pendant la campagne de Jacques Chirac. Appelée à capter l'essentiel du financement public des partis, l'U.M.P. apparaît désormais comme un grand parti du centre et de la droite, à l'image de la C.D.U. allemande, du Parti républicain américain ou du Parti conservateur britannique. Elle agrège des sensibilités différentes et des courants y apparaissent au grand jour. Pour autant, son avenir reste soumis à des incertitudes majeures : l'U.M.P. réussira-t-elle à maîtriser les querelles de personnes, notamment entre son président élu, Alain Juppé, et Nicolas Sarkozy, qui devraient encore s'accentuer à l'approche de la présidentielle de 2007 ? Pourra-t-elle développer un programme qui ne soit pas la seule défense et illustration de l'action gouvernementale – ce qui est l'un des enjeux de la fondation qui devrait être créée à l'U.M.P. ? Saura-t-elle, enfin, attirer les militants et, le moment venu, se renouveler ?
Devant ce qu'elle interprète comme une volonté hégémonique et prédatrice, l'U.D.F. avait deux choix possibles : le premier eût été d'accepter de se dissoudre dans l'U.M.P., tout en y formant un courant, mais cela pouvait signifier sa disparition à terme, en raison d'un nombre moins élevé de militants que ceux de l'ancien R.P.R., et d'une faible visibilité de son président, François Bayrou ; le second, finalement retenu, consistait à se battre pour conserver une existence autonome, mais au risque de la marginalisation, de l'appauvrissement et de pressions accrues sur ses membres pour rejoindre le parti majoritaire. En sauvant son groupe parlementaire (22 élus), en faisant entendre, chaque fois qu'elle en a la possibilité, sa différence d'appréciation sur la conduite des affaires publiques, en faisant valoir les risques que représente un parti tenté, selon elle, par la mise au pas, l'U.D.F. espère rallier de nouveaux membres si l'action gouvernementale devient plus critiquée dans l'opinion. Au-delà, elle entend peut-être jouer le rôle de « petit partenaire » dans la coalition, à l'image du F.D.P. ou des Verts allemands, monnayant son soutien à l'U.M.P. et, peut-être, un jour, à une gauche sociale-démocrate.
Quant au Front national, peu disert depuis son semi-échec aux législatives, il paraît, dès 2002, poser sans le dire la question de la succession de son dirigeant historique dont l'une des filles, Marine Le Pen, portée par une certaine vague médiatique, fait figure de concurrente de Bruno Gollnisch. Il pourra profiter de la désagrégation du M.N.R. auquel la défaite de Catherine Mégret, épouse de Bruno Mégret, lors de l'élection municipale de Vitrolles d'octobre 2002, a porté un coup qui semble fatal.
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Écrit par
- Nicolas TENZER : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris
Classification
Médias