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FRANCE L'année politique 2003

Une gauche divisée

L'affaiblissement et la division n'épargnent pas la gauche. La gauche plurielle semble alors définitivement morte – malgré un accord électoral entre le Parti socialiste et les Verts pour les régionales en Île-de-France – et chaque force joue d'autant plus une stratégie propre qu'elle est peu assurée de son message et se trouve elle-même divisée. Tandis que le leadership de Gilles Lemaire est contesté au sein du parti écologiste, Marie-George Buffet, portée à la tête du Parti communiste, en avril, lors du XXXIIe congrès, ne parvient pas à faire taire les contestations internes et les interrogations sur l'avenir du P.C.F.

La division n'épargne pas le Parti socialiste. Le congrès de Dijon (16 au 18 mai 2003) a avalisé le choix d'une voie moyenne incarnée par son premier secrétaire, François Hollande, à la motion duquel s'étaient ralliés une majorité de militants (61,37 p. 100). Mais cette synthèse n'est pas un document programmatique fort pouvant permettre au P.S. d'incarner un projet. Les contestataires (Nouveau Parti socialiste d'Arnaud Montebourg et Nouveau Monde d'Henri Emmanuelli, dont les motions ont obtenu 16,88 p. 100 et 16,33 p. 100 respectivement) continuent à se faire entendre ; ils ont créé le trouble lors du débat sur la Constitution européenne, le Parti socialiste cessant de parler d'une seule voix sur l'avenir de l'Europe. Enfin, certaines personnalités, notamment Laurent Fabius, Martine Aubry et Dominique Strauss-Kahn, se posent d'ores et déjà en candidats possibles pour 2007, affaiblissant la position du premier secrétaire. 82 p. 100 des sympathisants de gauche trouvent ainsi la gauche trop divisée, 73 p. 100 estiment qu'elle manque d'un leader et 67 p. 100 qu'elle n'a pas de projet qui présente une solution alternative (enquête Louis Harris-Libération-L'Express, novembre 2003).

Beaucoup soulignent que le Parti socialiste éprouve des difficultés à remplir sa fonction critique à l'égard de la politique gouvernementale. Certes, qu'il s'agisse de choix fiscaux, de politique en matière de sécurité, de justice ou d'éducation, d'orientations budgétaires, de réforme des retraites, des modalités de la décentralisation et de solidarité, l'ensemble ou presque des décisions du gouvernement se trouvent contestées. Mais ces prises de position cachent des visions qui peuvent être très diverses, comme sur le dossier des retraites – de l'accord de principe concernant la réforme, accompagné d'une critique de ses modalités, à la contestation pure et simple de sa nécessité – ou sur celui de la politique budgétaire – les uns dénonçant la façon qu'a la France de s'affranchir des règles du Pacte de stabilité, mais beaucoup n'acceptant pas une contrainte budgétaire rigoureuse. Certains, notamment Michel Rocard, critiquent aussi les modalités de la réduction du temps de travail mise en place par le gouvernement de Lionel Jospin, et d'autres, en privé, vont jusqu'à en contester la philosophie. La gauche se trouve en outre prise à contre-pied par certaines réformes qu'elle n'avait pas conduites, comme la suppression de la double peine en matière d'immigration, ou certains choix qu'elle ne peut critiquer trop fort, comme la lutte contre l'insécurité. Elle se divise aussi sur les questions de société, comme la laïcité.

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Écrit par

  • : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris

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