FRANCE L'année politique 2007
Six premiers mois entre réforme et pragmatisme
Les six premiers mois du gouvernement ont révélé quelques vraies ruptures, de fortes continuités, mais aussi certaines prudences inspirées par un pragmatisme avéré. Les ruptures les plus nettes apparaissent dans la sphère de la politique étrangère. Le rapprochement marqué avec les États-Unis, la perspective probable d'une réintégration de la France dans le commandement militaire intégré de l'O.T.A.N., une attitude plus favorable à Israël, peut-être une moindre proximité avec la Russie, des liens personnels moins forts avec l'Afrique subsaharienne et un discours plus ferme envers l'Iran s'accompagnent toutefois de points communs avec la politique élyséenne antérieure : une attitude qualifiée de « réaliste » à l'égard de la Chine, un engagement européen appuyé, avec une initiative pour débloquer la question du traité simplifié appelé à remplacer le projet de traité constitutionnel rejeté par les Français, une attention marquée à l'Afrique du Nord – qui serait partie prenante au projet d'Union méditerranéenne, lancé de manière encore un peu floue. Cependant, le projet d'ensemble reste encore incomplet et le style propre du président a pu surprendre et susciter des critiques, en Afrique comme en Allemagne, ainsi d'ailleurs que le rapprochement avec la Libye dans la foulée de son intervention réussie pour la libération des infirmières bulgares détenues dans ce pays.
Sur le plan intérieur, le président a confirmé ses promesses de campagne en faveur d'une décroissance de la pression fiscale, en particulier sur les successions et les donations, mais ce choix peut aussi apparaître dans la continuité d'options qui avaient été celles de gouvernements précédents, concernant notamment l'impôt sur le revenu. Une polémique s'est ensuivie sur le coût et la justice de ces mesures, d'autant plus que les marges de manœuvre du gouvernement – même si le président récuse le terme de « faillite » employé par François Fillon et celui de « rigueur » utilisé par Christine Lagarde – sont limitées, et la position de l'endettement et du déficit de la France surveillée par ses partenaires européens.
Si la nouvelle réforme des régimes spéciaux de retraite – autre promesse de campagne – s'inscrit dans le prolongement des réformes Balladur et Raffarin, celle des universités paraît plus hardie, même si elle ne va pas aussi loin que l'avait espéré Valérie Pécresse, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche. De même, le texte qui durcit les conditions d'entrée et de séjour des personnes immigrées, s'il a déclenché une forte polémique, y compris au sein du gouvernement, à propos du recours à des tests A.D.N. en matière de regroupement familial, peut apparaître comme la continuation d'autres lois de droite sur le même sujet. La loi sur le service minimum dans les transports peut aussi s'analyser principalement comme une forme de loi-cadre dont les contraintes semblent finalement assez réduites en comparaison de ce que souhaitaient certains parlementaires de droite. De même, dans le dossier de la fonction publique, le gouvernement manifeste un certain pragmatisme, s'engageant de manière progressive sur la voie d'une décroissance des effectifs de fonctionnaires, mais sans envisager de rupture radicale dans les modes de gestion et de statut et se montrant même prêt à satisfaire certaines revendications sur leur pouvoir d'achat. Si l'assouplissement des 35 heures et la possibilité plus large et plus avantageuse de recourir aux heures supplémentaires constituent une rupture avec la politique suivie par la gauche – quand bien même une partie de celle-ci n'y est pas hostile par principe −, la fusion annoncée entre l'A.N.P.E. et l'U.N.E.D.I.C. avait pu être proposée autrefois[...]
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Écrit par
- Nicolas TENZER : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris
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