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FRANCE L'année politique 2016

Une droite divisée, mais une primaire réussie

Primaire de la droite et du centre en 2016 - crédits : Martin Bureau/ Pool/ AFP

Primaire de la droite et du centre en 2016

L’état de division de la droite est largement comparable à celui de la gauche. Les primaires de la droite et du centre, organisées les 20 et 27 novembre, ont exposé ces fractures aussi bien en matière de valeurs dites « sociétales » que de politique économique et sociale, d’immigration et d’Europe. La politique à adopter envers la Russie après l’invasion d’une partie de l’Ukraine, l’annexion de la Crimée et son soutien au régime syrien de Bachar al-Assad est aussi devenue centrale dans le débat. Les divergences entre Alain Juppé et Nathalie Kosciusko-Morizet d’une part, François Fillon, Nicolas Sarkozy et Jean-Frédéric Poisson de l’autre, ont pris la forme d’une opposition frontale, Bruno Le Maire et Jean-François Copé faisant pour leur part une campagne plus nuancée sur ces sujets.

Cette primaire a remporté un succès inattendu, mobilisant 4 272 880 votants au premier tour et 4 404 812 au second. Avec 44,1 p. 100 des voix, François Fillon a largement distancé Alain Juppé (28,6 p. 100) au premier tour. Contrairement aux prévisions, l’ancien président Nicolas Sarkozy a essuyé une sévère défaite, n’obtenant que 20,7 p. 100 des suffrages exprimés, aucun des autres candidats ne dépassant 2,6 p. 100 des voix. Sans pour autant modifier l’issue du scrutin, le vote d’une partie des électeurs de gauche désireux d’empêcher une candidature de Nicolas Sarkozy contribue sans doute à expliquer ce résultat. Au second tour, François Fillon a remporté une victoire incontestable, avec 66,5 p. 100 des suffrages exprimés contre 33,5 p. 100 à Alain Juppé.

Ce triomphe a révélé l’ancrage des électeurs de la primaire (en majorité des urbains, âgés et issus des catégories moyennes et supérieures) dans une droite plus dure, notamment sur les valeurs traditionnelles et l’immigration, que modérée. En effet, la campagne de François Fillon avait été marquée par la combinaison d’un libéralisme économique assumé – réduction drastique du nombre de fonctionnaires, réforme substantielle de la Sécurité sociale, tempérée dans un second temps, dérégulation du marché du travail –, d’une conception conservatiste de la famille (refus de l’adoption plénière pour les couples homosexuels), d’une vision de l’Europe moins fédérale que confédérale et d’une politique étrangère de la France radicalement réorientée en faveur d’un partenariat avec la Russie. Cette ligne directrice, largement contestée non seulement à gauche mais aussi à droite et au centre – Hervé Mariton et François Bayrou avaient soutenu Alain Juppé, clairement opposé à la vision prorusse de l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy –, devra être confirmée ou infirmée lors de l’élection présidentielle. En effet, malgré le succès de la primaire, une large majorité de l’électorat traditionnel de la droite ne s’est pas déplacée et pourrait ne pas se retrouver dans les orientations défendues par François Fillon dont la victoire à la primaire est suivie d’un trou d’air dans les sondages. Tant le silence de celui-ci sur les crimes de guerre commis par Bachar al-Assad et la Russie de Vladimir Poutine que le soutien affiché d’une partie de la droite la plus dure (le collectif La Manif pour tous, certains soutiens de l’extrême droite qui ne se reconnaissent pas dans les orientations de Marine Le Pen sur les valeurs traditionnelles et furent à l’origine d’une campagne virulente de dénigrement contre Alain Juppé, parfois renommé « Ali Juppé » sur les réseaux sociaux) ont jeté un trouble. Signe de tensions persistantes, la nouvelle direction du parti Les Républicains mise en place par François Fillon après la primaire laisse une place jugée parfois trop réduite aux anciens lieutenants d’Alain Juppé. La bataille pour les investitures aux élections législatives qui suivront la[...]

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Écrit par

  • : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris

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Médias

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